Les jeunes Chinois se font opérer des paupières mobiles pour booster leur carrière

Publié le Lundi 29 Juillet 2019
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
Les jeunes Chinois se font opérer des paupières mobiles pour booster leur carrière
Les jeunes Chinois se font opérer des paupières mobiles pour booster leur carrière
La pratique de la chirurgie est courrante en Asie, principalement en Chine et en Corée du Sud. La nouvelle mode : se faire refaire les paupières à des fins professionnelles. Inquiétant.
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Ce n'est pas la première fois qu'une tendance liée à la chirurgie esthétique émerge, et d'autant plus en Asie de l'Est. La pratique y est souvent monnaie courante (en 2018, 20 millions de personnes auraient passé le pas, selon So-Young, une plateforme digitale qui promeut la chirurgie esthétique). On se fait refaire le nez, le menton, la bouche de façon plus ordinaire qu'en Europe. Ou du moins, son recours est beaucoup moins tabou. Et si on encourage évidemment les femmes et les hommes à faire ce qu'ils et elles souhaitent de leur corps pour s'y sentir mieux, il reste toutefois inquiétant de voir que la mode y est dictée par des attentes sociales oppressantes. Dans cette région du monde, ce n'est pas la confiance en soi qui est en jeu, c'est quasiment la valeur de l'individu·e.

Récemment, une nouvelle lubie est apparue : celle d'altérer ses paupières mobiles pour prétendre à une meilleure carrière. Un trait physique occidental qui plairait aux entreprises. Une jeune Chinoise de 17 ans, Lin Li, a même témoigné sur un réseau social local, Xiaohongshu, expliquant qu'elle souhaitait se faire refaire le nez et les paupières mobiles avant de rentrer à l'université. Selon elle, elle aurait davantage de chance de réussir sur le plan des études puis plus tard professionnel, si elle entreprenait ces modifications physiques.

La publication a recueilli plus de 1000 réponses en seulement deux semaines - certain·es internautes recommandaient des cliniques de chirurgie plastique, d'autres suggéraient qu'à un âge si précoce, il serait plus sage d'utiliser le maquillage avant de passer au bistouri. Une décision prise au sérieux immédiatement, donc. Car Lin Li n'est pas la seule a envisager une opération de la sorte.

Une opération populaire mais risquée

Un nombre croissant d'étudiants de la génération Z (qui qualifie les personnes nées après 2000) chercheraient ainsi à avoir recours à la chirurgie esthétique dans l'espoir de faire pencher la balance en leur faveur à l'école, au travail et dans leur vie amoureuse, selon Xinhua, l'agence de presse publique chinoise.

Fin 2018, 64% des consommateurs étaient des millennials (nés après 1990) et 19% étaient des post-millennials (nés après 1995), d'après So-Young. L'opération la plus populaire : la blépharoplastie, ou la chirurgie des paupières. Beaucoup pensent qu'il s'agit d'une tentative d'"occidentaliser" son apparence, tandis que d'autres soulignent que la procédure remonte aux années 1800, avant que l'occidentalisation ne soit généralisée. Qu'elles que soient les origines de la procédure, elle comporte des risques si elle n'est pas effectuée dans des conditions irréprochables.

C'est là que le bât blesse. De nombreux cas ont été recensés par la Commission nationale de la santé chinoise. Le problème : les conditions sont parfois douteuses et les médecins qui pratiquent ces opérations à succès, illégaux. Les patient·es encourent donc des risques graves en se rendant dans certains cabinets. Entre mai 2017 et mai 2018, 2772 cas liés à la chirurgie plastique illégale ont été traités par les services de santé chinois. Un chiffre glaçant provoqué par ce besoin destructeur de correspondre à des idéaux de beauté irréalistes, qui touche de plus en plus fortement les jeunes générations.