Pourquoi le prix d'interprétation féminine de l'actrice Zar Amir Ebrahimi fait enrager l'Iran

Publié le Mercredi 01 Juin 2022
Louise  Col
Par Louise Col Journaliste
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Prix d'interprétation féminine au dernier Festival de Cannes, le sacre de l'actrice iranienne Zar Amir Ebrahimi pour le film "Les Nuits de Mashhad" a fait réagir. Notamment au sein du pays.
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C'est au sein du 75e Festival de Cannes qu'a été sacrée la lumineuse actrice iranienne Zahra Amir Ebrahimi. Prix d'interprétation féminine, la comédienne a été saluée pour sa performance dans le thriller Les Nuits de Mashhad, réalisé par le cinéaste iranien Ali Abbasi, qui revient sur l'histoire vraie d'un tueur de prostituées ayant sévi en Iran au début des années 2000 au sein de la ville de Mashhad.

Mais si le jeu de l'actrice a enchanté le jury cannois, l'Iran ne voit pas cela du même oeil. L'Organisation cinématographique de l'Iran, liée au ministère de la Culture, a fustigé cette récompense, accusant le Festival de Cannes d'avoir commis "un acte biaisé et politique". Pourquoi cela ? Car Les nuits de Mashhad ne serait autre qu'un film "faux et dégoûtant", délivrant "une image déformée de la société iranienne", dixit le communiqué.

Plus encore, ce thriller "[insulterait] ouvertement les croyances transcendantes des chiites".

"Ce film parle des femmes"

Plus encore, relate le magazine Vanity Fair, l'Organisation cinématographique de l'Iran va jusqu'à comparer Les Nuits de Mashhad d'Ali Abbasi au célèbre livre Les Versets sataniques de Salman Rushdie, jugé "blasphématoire" à sa sortie à la fin des années 80, et ayant engendré un appel au meurtre visant son auteur, émis par l'ayatollah Rouhollah Khomeiny. Comme le rappelle TF1, le cinéaste iranien n'est pas tant surpris que cela par la colère des autorités iraniennes : Ali Abbasi, qui vit en Suède, a réalisé son film sans leur accord, "recréant les décors de Mashhad en Jordanie".

"... Mais même filmer la vie quotidienne ordinaire d'une femme est un problème en Iran. Dans tous les films iraniens, les femmes se couchent avec leur foulard ! Elles ne touchent jamais personne, elles ne serrent jamais la main...", a déploré auprès des journalistes de la première chaîne le réalisateur iranien, dont le thriller, prometteur et sulfureux, est attendu dans nos salles le 13 juillet prochain.

Zar Amir Ebrahimi, quant à elle, a été honorée de cette récompense. A l'écouter, cette oeuvre est importante au sein de la culture iranienne et face à la censure. La comédienne a déclaré à ce titre : "Ce film parle des femmes, de leur corps, ce film est rempli de haine, de mains, de seins, tout ce qu'on ne peut montrer en Iran".