En Espagne, les militants anti-IVG pourront être condamnés pour "harcèlement"

Publié le Jeudi 07 Avril 2022
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
"La révolution sera féministe ou ne sera pas", Barcelone, 23 novembre 2018.
"La révolution sera féministe ou ne sera pas", Barcelone, 23 novembre 2018.
Le Sénat espagnol vient d'adopter une loi qui prévoit une peine de prison pour les militant·es anti-IVG coupables de "harcèlement" envers les femmes souhaitant avorter et les soignant·es pratiquant la procédure.
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Les milliers d'Espagnol·es à avoir défilé le 27 mars dans les rues de Madrid contre ce projet de loi n'y auront rien fait. Ce mercredi 6 avril, le Sénat a définitivement adopté une réforme du Code pénal qui autorise à condamner les militant·es anti-IVG qui harcèlent les personnes ayant recours à la procédure.

Les peines vont désormais de 3 mois à 1 an de prison pour "obstacle à l'exercice du droit à l'interruption volontaire de grossesse" via "des actes gênants, offensifs, d'intimidation ou de pression", rapporte l'AFP. Des travaux d'intérêt général pourront aussi être attribués pour les coupables. Un texte à l'initiative du parti socialiste du Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, qui vient renforcer un droit qui demeure fragile dans le pays, et aux femmes concernées de prendre la décision d'avorter sans craindre de représailles.

Selon un rapport de l'Association des cliniques autorisées à pratiquer l'IVG publié en 2018, et relayé par l'agence de presse, 89 % d'entre elles affirment avoir été harcelées et 66 % menacées.

Une forte mobilisation anti-choix devant les cliniques

Dépénalisée en 1985 mais seulement légalisée en 2010 sans justification médicale et jusqu'à 14 semaines, l'interruption volontaire de grossesse reste un luxe dans certaines régions espagnoles, où réside une "forte tradition catholique", rappelle encore l'AFP. D'après le gouvernement, 8 des 50 provinces du pays n'y ont d'ailleurs recensé aucune procédure de la sorte depuis 1985.

Les mouvements qui s'y opposent sont quant à eux, particulièrement présents, et l'objection de conscience des médecins, très fréquente. Des groupes d'opposant·es se rassemblement souvent devant les établissements médicaux pour dissuader les patientes à coup de foetus en plastique ou en les faisant monter dans des véhicules équipés d'un échographe.

Ce mercredi 6 avril, alors que le Sénat entérinait le texte, des militant·es anti-choix se sont réuni·es devant le monument pour dénoncer une "criminalisation" de leurs activités. Activités qui consistent, faut-il le souligner, à refuser aux femmes le droit de disposer de leur corps.