En Iran, 2 000 femmes ont été interdites d'entrer dans un stade de foot

Publié le Jeudi 31 Mars 2022
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
Des Iraniennes assistent à un match de foot à Téhéran, en octobre 2019.
Des Iraniennes assistent à un match de foot à Téhéran, en octobre 2019.
L'équipe nationale d'Iran affrontait celle du Liban, mardi 29 mars. Une rencontre à laquelle environ 2 000 femmes n'ont pas pu assister, l'entrée du stade leur ayant été refusée malgré la possession de billets.
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Dans les gradins du stade Imam Reza de la ville de Mashhad, dans le nord-est du pays, l'heure était à la liesse mardi 29 mars, lors de la victoire des Iraniens face à l'équipe du Liban. Il y avait de quoi : le match qui comptait pour les éliminatoires de la Coupe du monde 2022 a été remporté 2 à 0 par les footballeurs à domicile. Révoltant, donc, que des milliers de supportrices n'aient pas pu célébrer la performance de la "Team Melli" en direct comme prévu.

"Environ 2 000 femmes iraniennes, qui avaient acheté des billets pour le match Iran-Liban, étaient présentes dans le périmètre du stade Imam Reza, mais n'ont pas pu entrer dans le stade", a ainsi indiqué l'agence de presse ISNA, rapporte l'AFP.

"Plusieurs vidéos montrent des femmes se débattant après avoir été aspergées de bombe lacrymo par des agents de sécurité qui les empêchaient d'entrer dans le stade alors qu'elles avaient des billets", décrit à son tour AlJazeera . "Une image montrait un enfant pleurant dans les bras d'une jeune femme."

"Il fallait leur trouver un endroit adéquat"

Pour Mohsen Davari, le gouverneur de Mashhad, l'incident émane simplement d'un problème de capacité d'accueil. Sur la chaîne du service public iranien IRIB, il déclare sans adresser spécifiquement le problème : "Je m'excuse que beaucoup de gens n'aient pas pu entrer dans le stade et regarder le match de football entre les équipes nationales d'Iran et du Liban. Malheureusement, il n'a pas été possible à un grand nombre de personnes à l'extérieur d'entrer dans le stade".

Le procureur général Mohammad Jafar Montazeri a quant à lui qualifié le traitement réservé aux spectatrices d'inacceptable, et ajouté : "si les conditions permettaient la vente de billet aux femmes, il fallait leur trouver un endroit adéquat". Dans les stades, les femmes sont installées dans des gradins séparés des hommes, même lorsqu'ils sont membres de leur famille. Pour la fédération nationale de football, qui n'a pas présenté d'excuses, leur présence sans ces conditions aurait pu provoquer une "crise".

"Il ne peut y avoir de retour en arrière"

En janvier dernier, c'était la première fois depuis 3 ans que les Iraniennes avaient le droit d'assister à un match de foot. Pendant près de 40 ans, l'accès leur était quasi-systématique refusé par la république islamique. Des décisions fermement condamnées par la Fifa qui, en septembre 2019, ordonnait au pays d'autoriser l'accès aux rencontres aux femmes, sans quoi son équipe serait suspendue.

"La position de la FIFA concernant la présence des femmes lors des matches de football en Iran est claire : des progrès historiques ont été réalisés - comme l'illustre l'étape importante d'octobre 2019, lorsque des femmes ont été autorisées à entrer dans le stade pour la première fois en 40 ans", affirme l'instance. Et de conclure : "La Fifa compte les voir se poursuivre, car il ne peut y avoir de retour en arrière".