Le boom du "köpskam", la honte d'acheter des fringues

Publié le Jeudi 16 Janvier 2020
Mylène Wascowiski
Par Mylène Wascowiski Rédactrice
Après le flygskam, faut-il avoir honte d'acheter des fringues ?
Après le flygskam, faut-il avoir honte d'acheter des fringues ?
On connaissait le "flygskam", la honte de prendre l'avion pour des raisons écologiques. Une tendance qui s'attaque désormais à l'industrie de la mode avec l'émergence du "köpskam", à traduire par "la honte d'acheter des vêtements."
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L'industrie de la mode doit-elle trembler ? Les consciences vont-elles s'éveiller face à l'urgence écologique ? C'est la tendance qui semble émerger en Scandinavie, si l'on en croit les chiffres relayés en août dernier par le quotidien suédois Aftonbladet. Dans le pays, les géants de la mode ont en effet vu leurs ventes diminuer ces dernières années, un phénomène qui s'expliquerait par le concept de "köpskam", à traduire "la honte d'acheter des vêtements."

Une tendance qui devrait prochainement s'étendre au-delà des frontières suédoises, selon le PDG de la société de conseil suédoise HUI Research. Pour lui, ce n'est "probablement qu'une question de temps avant que le köpskam devienne un concept répandu", relaye le Huffington Post France.

7500 litres d'eau pour un jean


Le "köpskam" repose sur la pollution générée par l'industrie de la mode, sur laquelle les consommateurs ne semblent plus vouloir fermer les yeux. Ces dernières années, associations et médias ont alerté sur les dommages de la mode sur la planète et bon nombre d'enquêtes ont prouvé au fil des années le préjudice de la fast fashion sur l'environnement. De quoi faire émerger le concept de "köpskam" dans le pays qui a pourtant vu naître H&M.

Selon les chiffres de la Fondation Ellen MacArthur, la fabrication de nos vêtements génèrent chaque 1,2 milliard de tonnes de gaz à effet de serre. 7 500 litres d'eau sont utilisés pour la fabrication d'un unique jean, soit l'équivalent de l'eau bue par un être humain pendant sept ans, souligne Le Monde. Il faut par ailleurs 14 000 km de fil de nylon et 750 litres d'eau pour fabriquer une petite paire de collants... qui, dans 72% des cas, ne sera utilisée pas plus de six fois avant de se retrouver aux ordures selon une étude menée en mai 2018 par l'association HOP (Halte à l'obsolescence programmée).

Le lavage et l'entretien de nos vêtements n'est, lui non plus, pas sans conséquences et chaque passage en machine génère la libération dans les eaux de milliers de microfibres en plastique, qui se retrouvent ensuite dans les océans et alimentent les "Îles Poubelle".


L'explosion du marché de seconde main


Un bilan lourd que les consommateurs, en Suède du moins, ne semblent plus vouloir être responsables. Pour se faire, ils boycottent l'achat de pièces neuves et se tournent désormais vers la mode de seconde main. Des plateformes comme Vinted - spécialisée dans le vente de vêtements d'occasion entre particuliers - ont explosé, avec une croissance globale annuelle de 300% en 2018. Rien que ça.

Une tendance qui semble se dessiner également en France, où le marché vintage était évalué à un milliard d'euros en 2018, selon les chiffres de l'observatoire économique de la Fédération française du prêt-à-porter féminin (FFPAPF). Un tiers des consommateurs français affirment par ailleurs avoir déjà acheté des vêtements d'occasion sur internet, sur Vinted ou chez une petite - ou grande - marque spécialisée dans l'upcycling.

Mieux : le marché de la seconde main pourrait bien surpasser celui de la fast-fashion d'ici 2028, selon un rapport de GlobalData relayé par le Huffington Post. Dans sa démarche, le "köpskam" se rapproche fortement du "flygskam", phénomène là encore suédois que l'on peut traduire par "la honte de prendre l'avion". Motivé lui aussi par des raisons environnementales, ce phénomène pousse de plus en plus de voyageurs à boycotter l'avion et à se déplacer par les mers et les trains. Une bonne nouvelle, là encore, pour notre planète.