Non, vous n'avez pas à souffrir pendant les fêtes en famille

Publié le Mercredi 22 Décembre 2021
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
Non, vous n'avez pas à souffrir pendant les fêtes en famille
Non, vous n'avez pas à souffrir pendant les fêtes en famille
Les retrouvailles familiales qui s'orchestrent autour de différents repas à Noël (ou autre) sont souvent source de joie, de bonne bouffe mais aussi... de débats qui nous prennent aux tripes. Et si on décidait de ne pas y laisser nos plumes cette année ?
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Les sujets qui "fâchent", il y en a plein. Les sujets qui "fâchent" et nous concernent, d'autant plus. A chaque réunion de famille, on y a droit : le petit tacle sur la présomption d'innocence, la "théorie du genre" ou la pique sur #MeToo destinée à nous faire réagir. "Maintenant, dès qu'un mec lève le petit doigt, il est accusé d'agressions sexuelles", a-t-on souvent entendu parmi un flot de "on ne peut plus rien dire" et de "elles cherchent seulement à faire le buzz" éreintants.

D'habitude, on y répond. On s'indigne, on explique, on éduque. On essaie tant bien que mal de démontrer à coups de chiffres et de propos de victimes ou de spécialistes rapportés dans les médias qui se sont penchés sérieusement sur ces fléaux, que les arguments envoyés en face, par nos proches qui n'y connaissent rien, sont infondés.

On émet l'idée que la société et ses constructions sont nocives pour tou·te·s, et dictent des comportements qu'il est temps de condamner. On ne laisse rien passer, quitte à ce que ces échanges qui puisent dans nos ressources et essorent notre joie de vivre, gâchent notre fête. Et nous restent bien trop longtemps en tête.

D'ici quelques jours - comme dans plusieurs mois quand on reviendra pour notre anniversaire/Pâques/le mariage de notre soeur - on risque de ne pas échapper à ces débats que l'on sait, après de nombreuses années de pratique, particulièrement stériles.

Alors en 2021, on se demande : est-on vraiment venu·e ici pour souffrir ? Ou y a-t-il une autre façon de survivre aux rassemblements familiaux sans avoir à donner de cours de féminisme et de déconstruction anti-patriarcale qui, clairement, méritent salaire ?

A cette dernière interrogation, la réponse est oui. Et voici comment.

Quand repas de famille rime avec débats houleux
Quand repas de famille rime avec débats houleux

Ne pas culpabiliser de se préserver

Introduire des discussions engagées dans nos cercles privés est essentiel, tant cela contribue à adresser des biais intériorisé, et invite nos proches à remettre en question leurs discours, réflexes, jugements. Mais parfois, la force nécessaire à ces initiatives est au-dessus des nôtres.

Surtout lorsqu'on se sait un peu seul·e contre tou·te·s, que ce sont les autres qui lancent un sujet qui nous va droit au coeur, et qu'on aimerait pouvoir déguster nos patates rôties et purée de marron tranquille sans devenir la bête curieuse qui prêche un monde meilleur pour ses pairs. Quelle audace !

Sur Instagram, le compte féministe La Féminologie écrit justement à l'attention de ses abonné·e·s : "pendant les fêtes de fin d'année, tu as le droit de te préserver d'un débat pourtant important pour toi pour ne pas passer une mauvaise soirée ; de ne pas relever une énième remarque sur un sujet qui te touche pour éviter d'en coller une à quelqu'un ; de t'isoler un moment ou carrément de partir si c'est trop pour toi. Ta santé mentale est plus importante". A imprimer.

Passer le relai aux non concerné·e·s

C'est aussi le rôle des allié·e·s (qu'il s'agisse de l'égalité femmes-hommes, de l'antiracisme, de la cause LGBTQIA+), de pouvoir soulager les personnes que certaines conversations ou réflexions blessent directement. En se chargeant de répliquer avec davantage de recul, d'énoncer des faits, de prendre le relai. Et à elleux, de ne rien laisser passer.

Attention, il ne s'agit pas de dire qu'on aurait besoin d'aide pour se défendre. Mais le soutien des autres, quand il est sincère, est dans certains cas particulièrement bienvenu. Au réveillon devant une quinzaine de membres de notre famille qui expriment leur côté boomer (au mieux) en toute décomplexion, par exemple.

Penser à l'après et à l'extérieur

Heureusement pour nous, ce contexte étouffant s'achèvera bien assez tôt. Dans moins d'une semaine, exactement, ou quand on reprendra le train pour notre chez soi.

Là-bas, les personnes qu'on fréquente ne boivent pas les pires paroles de BFM, ne se sentent pas menacées par celleux qui ne leur ressemblent pas, ne nous prennent pas pour Google en nous posant une tonne de questions dont elles trouveraient aisément les réponses en ligne.

En attendant, si on a besoin d'une piqûre de rappel quant à l'existence de cette oasis, on utilise notre téléphone. On disparait quelques minutes pour se confier à nos ami·e·s qui nous comprennent sans problème, se moquer si ça nous fait du bien, recharger ses batteries. Et enfin, revenir d'attaque pour la bûche.

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