Les notes vocales vous agacent grave ? Voici pourquoi

Publié le Jeudi 24 Mars 2022
Le HuffPost
Par Le HuffPost Média
Laisser une note vocale
Laisser une note vocale
Les notes vocales postées sur des messageries instantanées comme WhatsApp ou Messenger s'imposent de plus en plus dans notre manière de communiquer, parfois malgré nous. Pourquoi cela peut-il agacer ? Pourquoi d'autres en sont devenus accros ? Décryptage.
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"Un message vocal, quand ça dure plus de 30 secondes, ça ne va pas." "Je déteste car je bafouille et je perds le fil." "Souvent, je suis dans un contexte où je ne suis pas à l'aise pour écouter." "Je déteste, je réponds toujours par écrit car je n'aime pas ma voix." "J'adore, surtout pour les gossips ou les histoires drôles."

Le moins que l'on puisse dire, c'est que les messages vocaux, voice notes, ou vocalz comme certains les appellent, divisent. Il s'agit bien des messages que l'on peut enregistrer sur les différentes messageries instantanées et envoyer à son interlocuteur. Whatsapp, Instagram, Messenger, Signal... Toutes ont désormais cette option.

La scission entre fans et détracteurs est-elle une question de génération ou d'évolution des pratiques ? "Les plus jeunes se sont appropriés les messages vocaux, estime Vanessa Lalo, psychologue clinicienne spécialiste des pratiques numériques. On avait tendance à dire qu'ils n'étaient que dans l'écrit et puis finalement ça évolue énormément."

Allergiques aux appels téléphoniques


Une nouvelle habitude qui peut étonner tant les nouvelles générations sont allergiques aux conversations téléphoniques classiques. "L'appel aujourd'hui est de plus en plus considéré comme intrusif, souligne la psychologue. Quand on reçoit un appel, il est souvent synonyme de mauvaise nouvelle ou d'intrusion car il va durer deux plombes."

Pourquoi alors ces jeunes qui détestent décrocher leur téléphone se sentent-ils à l'aise pour enregistrer des messages vocaux ? "Il y a un problème de prise de parole en direct, une angoisse de la conversation et de ce qu'on va pouvoir dire", analyse Catherine Lejealle, sociologue et chercheuse spécialiste des usages digitaux à l'ISC Paris.

Les messages vocaux permettraient donc de communiquer par la voix mais de manière "asynchrone". On peut prendre le temps de répondre et même réenregistrer notre message s'il ne nous plaît pas. "Souvent, les messages vocaux sont utilisés pour raconter une anecdote, quelque chose qui vient de nous arriver, avec des détails, développe-t-elle. Pour faire passer l'humour ou l'ironie, l'écrit n'est pas toujours adapté. 70% de la communication, c'est du non verbal."

Les jeunes n'ont pas pour autant l'apanage des voice notes. "Chez les anciennes générations, on observe aussi un grand boom des messages vocaux, car certains mettent trop de temps à écrire des messages ou ne sont pas à l'aise avec l'écrit, expose Vanessa Lalo. Les personnes qui ne parlent pas bien la langue, aussi, sont parfois plus à l'aise avec des vocaux."

Regarder son téléphone portable
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Une sphère réservée à l'intime


Certains n'acceptent les messages vocaux que s'ils proviennent de personnes très proches, qui racontent des anecdotes personnelles, amusantes ou marquantes. Pour la sociologue Catherine Lejealle, la fonction du message vocal n'est en effet pas de délivrer un message. Pour cela, il y a l'écrit.

"On envoie une voice note pour entretenir la relation et rappeler combien l'autre est important, soutient-elle. C'est une manière de communiquer très personnalisée et chargée d'affectif. Donc c'est forcément dans une sphère privée très restreinte."

Le message vocal permet donc de garder un lien privilégié, à une heure où les contacts simultanés se sont multipliés. "On oublie qu'avant, on avait des barrières financières ou techniques, rappelle Catherine Lejealle. Il n'y a pas si longtemps, les forfaits mobiles permettaient d'envoyer 20 SMS par mois. D'un coup, c'est devenu illimité."

Les messages vocaux ne semblent pas très adaptés à la sphère professionnelle. "J'avais une cheffe hystérique qui me faisait des voices entre 4 à 13 min, environ 15 à 20 fois par jour, raconte Joséphine, 30 ans. Elle ne savait pas être concise et il fallait que je réécoute toute la voice pour 30 secondes utiles. Je devenais complètement folle et j'ai failli faire un burn-out."

On peut aussi préférer l'écrit parce qu'il y a une trace. "Par écrit, ça peut être plus facilement archivé, classé ou transféré. Et ça correspond à un certain formalisme", résume la sociologue Catherine Lejealle.

Un temps d'écoute limité


La longueur des messages est aussi un sujet. "Quand une voice note arrive, on doit mettre ses écouteurs et se mettre dans certaines circonstances pour écouter le blabla de l'autre, souligne Vanessa Lalo. Si c'est trop long, on peut se sentir obligé d'écouter de manière passive. C'est pour cela que des applications permettent d'augmenter la vitesse de lecture."

Au-delà d'une minute, certains trouvent ça long. "Une voice note de plus de deux minutes, c'est l'enfer", témoigne une utilisatrice qui ne les utilise que pour "gossiper" ou raconter de petites anecdotes ou des blagues. "Plus long, ça peut devenir insupportable. Ça fait partie de ce que l'on appelle l'économie de l'attention, renchérit la sociologue. On a des degrés d'attention de plus en plus faibles."

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