Pourquoi embrasser le "pyt", le lâcher-prise danois

Publié le Jeudi 07 Mars 2019
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
Pourquoi embrasser le "pyt", cet état d'esprit danois anti-frustration ?
Pourquoi embrasser le "pyt", cet état d'esprit danois anti-frustration ?
"Pyt", c'est un mot venu tout droit du Danemark et qui signifie, en gros, "tant pis" ou "ce n'est pas grave". Une façon d'apporter à n'importe quelle situation frustrante une dose de lâcher prise nécessaire.
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Les Danois·es ont été élus peuple le plus heureux du monde à plusieurs reprises, une bonne raison pour leur piquer deux ou trois mécanismes et autres philosophies de vie. Après le succès du "hygge", cet art de vivre cosy qui appelait au confort et à l'intimité, et qui a conquis une bonne partie du monde occidental, voici le "pyt", une façon de relativiser qui pourrait nous faire économiser une énergie considérable.

Prenons un exemple concret. Quand on se lève en retard pour aller bosser le matin, il y a neuf chances sur dix pour que quelqu'un nous fasse perdre du temps dans l'escalator du métro. Une personne qui aurait oublié de se mettre sur la droite des marches, par exemple. Absolument rien de grave, en soi (ça arrive à tout le monde, même aux plus fier·es des citadin·es), mais notre frustration déjà bien présente finit par se transférer sur ce petit obstacle de rien du tout.

Généralement, on grogne, on est désagréable, on attribue le poids de toute notre journée à ce léger contretemps - qui ne serait pas arrivé si on s'était réveillée à l'heure.

Les Danois·es, ces êtres de lumière, se disent simplement "pyt", qui veut dire "tant pis", "ce n'est pas grave", et ne se laissent aucunement atteindre par cette mini-rage qui pourrait empirer s'ils ou elles lui en donnaient l'occasion. Pareil pour un verre cassé dans la cuisine : "pyt". Comme une façon de dire qu'on n'y peut rien et que ça ne sert à rien d'en être affecté·e.

La technique marche d'ailleurs si bien que, même à l'école, on l'utilise - sous forme plus ludique cependant. Marie Helweg-Larsen, psychologue danoise, explique à Quartz que certain·es profs mettent à disposition un bouton "pyt", et encouragent leurs élèves à appuyer dessus lorsqu'ils expérimentent ces mêmes frustrations à échelle d'enfant (un stylo introuvable ou encore une partie de jeu perdue). "Cela les aide à comprendre que tout ne peut pas être parfait", affirme l'experte. "Et ce sont des choses importantes à apprendre".

Au-delà de rendre notre journée plus agréable et moins concentrée sur le négatif, cet état d'esprit fait aussi ses preuves avec le stress. Marie Helweg-Larsen ajoute ainsi qu'il s'agit d'une "tentative sincère de s'encourager et d'encourager les autres à ne pas s'enliser dans de petites frustrations quotidiennes. Un chef d'entreprise danois a même suggéré que le fait de savoir quand dire "pyt" au travail peut conduire à une plus grande satisfaction professionnelle."

De quoi nous convaincre rapidement de voir les choses autrement, et surtout ce satané verre enfin à moitié plein.