Pascale Thumerelle : "La culture, un pilier du développement durable"

Publié le Jeudi 01 Novembre 2012
Pascale Thumerelle : "La culture, un pilier du développement durable"
Pascale Thumerelle : "La culture, un pilier du développement durable"
"Culture : les raisons d'espérer". C'est autour de ce thème qu'artistes, experts, responsables publics et privés se réuniront du 15 au 17 novembre prochain au Palais des Papes, pour le cinquième Forum d'Avignon. Pascale Thumerelle, directrice du développement durable de Vivendi, nous livre ses "raisons d'espérer".
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La culture/l’imagination créative vous donne-t-elle une raison d’espérer ?

La reconnaissance de la culture comme partie intégrante des droits humains universels contribue à promouvoir l’ouverture d’esprit, la tolérance et la paix entre les hommes et les civilisations. Si l’on entend par culture « l’ensemble des connaissances acquises qui permettent de développer le sens critique, le goût, le jugement » (Le Robert), alors la culture est au cœur de l’identité humaine. Elle nourrit notre capacité à espérer, notre besoin de confiance pour vivre dans la dignité : confiance en soi, en l’autre, en l’avenir. Elle donne à l’individu, aux communautés, aux peuples les ressorts intimes pour combattre la peur et l’oppression. Elle est au cœur du développement harmonieux des habitants de notre planète. La culture ouvre la voie à l’imagination créative, au souffle, à ce qui nous anime. Elle naît grâce au plaisir, s’épanouit grâce à la curiosité, résiste grâce à l’audace. Il faut veiller à l’encourager comme on veille à faire grandir un enfant. Elle peut représenter une menace pour les ennemis de l’esprit qui veulent régner en maîtres sur les consciences.

L’éducation des filles en est une bonne illustration. Malgré de considérables progrès accomplis en matière d’égalité entre les femmes et les hommes dans de nombreux pays, malgré les engagements pris par les plus hautes instances nationales, européennes ou internationales, on comprend bien que l’étouffement des cerveaux féminins procède de cette obsession de certaines personnes influentes  d’empêcher les fillettes et les femmes de cultiver cette capacité à exercer leurs facultés intellectuelles et de satisfaire leur soif de culture. Il semble pertinent d’évoquer l’abondante littérature rédigée par d’illustres « penseurs » sur ce thème. Citons François de Salignac de La Mothe Fénelon (1651-1715), homme d’église et académicien français, auteur de l’ouvrage « De l’éducation des filles » qui, dans une lettre « À une dame de qualité », livre à cette dernière ses conseils pour éduquer sa fille : « Comme mademoiselle votre fille montre un esprit assez avancé, avec beaucoup d’ouverture, de facilité et de pénétration, je crains pour elle le goût du bel esprit, et un excès de curiosité vaine et dangereuse. [ …] Qu’elle apprenne à se méfier d’elle-même, et à craindre les pièges de la curiosité et de la présomption : qu’elle s’applique à prier Dieu en toute humilité, à devenir pauvre d’esprit, à se recueillir souvent, à obéir sans relâche, à se laisser corriger par les personnes sages et affectionnées, jusque dans ses jugements les plus arrêtés, et à se taire, laissant parler les autres ». Ce témoignage, certes ancien mais qui trouve encore un écho dans certaines régions du monde frappées par les extrémismes de toutes sortes, illustre bien que la culture agit comme une force puissante contre l’exclusion, celle des fillettes, des femmes, mais plus largement celle des hommes qu’il est utile ou indifférent de maintenir dans l’obscurité.

Cette mise en lumière de la culture comme faisant pleinement partie des droits humains universels bénéficie par ailleurs du coup de projecteur apporté par les technologies de l’information et de la communication : elles facilitent un meilleur partage du savoir auprès de ceux qui peuvent rester en marge de l’accès à la culture. Autant de raisons d’espérer et de se mobiliser en faveur de cette grande et belle cause : « Allumer les flambeaux dans les esprits », comme le proclamait Victor Hugo dans un discours prononcé en 1848 à l’Assemblée nationale.

Qui l’incarne le mieux ?

Celles et ceux qui, par leur engagement, leur talent, leurs actes, leur disponibilité, leur enthousiasme, leur pédagogie et leurs investissements transmettent le goût et l’envie de culture.

Quelle serait l’initiative/projet/œuvre personnelle qui concrétiserait votre raison d’espérer ?

Vivendi, groupe industriel mondial, investit plus de deux milliards d’euros dans le cinéma, les programmes audiovisuels, les jeux vidéo ou la musique et plus de trois milliards d’euros dans les infrastructures de télécommunications. Sa contribution au développement durable est spécifique : permettre aux générations actuelles et futures de satisfaire leur besoin de communiquer, nourrir leur curiosité, développer leurs talents et encourager le dialogue interculturel.

La culture constitue un pilier essentiel de sa politique de développement durable car elle répond à la responsabilité sociétale des industries culturelles : comment nourrir au mieux les capacités créatives des générations actuelles et futures ? Comment veiller à ne pas favoriser une monoculture, source d’obésité intellectuelle nuisible à l’épanouissement de millions de clients dans le monde ? Pour éviter ces écueils, Vivendi s’est fixé comme objectifs d’encourager la création musicale, cinématographique et audiovisuelle dans sa diversité, de contribuer au renforcement des capacités de production dans les territoires où le groupe est présent, et notamment en Afrique, ou encore de valoriser le patrimoine, en numérisant par exemple des trésors culturels devenus indisponibles.

Vivendi est la première entreprise à intégrer des objectifs liés à la promotion de la diversité culturelle dans la rémunération variable de ses dirigeants. On pourrait espérer que cette bonne pratique novatrice, émanant du secteur privé, puisse être partagée avec d’autres industries culturelles au niveau local et international.

Comment souhaitez-vous la transmettre aux générations futures ?

Vivendi a l’ambition d’encourager la participation de ses clients à la vie culturelle, de faciliter leurs échanges grâce aux technologies de l’information et de la communication, et de favoriser l’esprit d’ouverture entre les peuples et les générations. Aussi Vivendi et l’Alliance des civilisations des Nations unies partagent-ils la volonté d’inscrire la diversité culturelle et le dialogue interculturel dans l’agenda mondial du développement durable, trop souvent axé sur les seules questions environnementales. Nous veillons, avec d’autres acteurs publics et privés, à porter ce thème à l’attention des décideurs publics, dirigeants d’entreprise, chercheurs, experts professionnels, représentants de la société civile, responsables des organisations non gouvernementales, analystes financiers et investisseurs, etc…

De manière très concrète, pour illustrer le positionnement de Vivendi et promouvoir la culture comme pilier du développement durable, j’ai eu l’idée de créer un site web « Cultur(e)s avec Vivendi : un voyage dans la diversité culturelle ». Disponible en français et en anglais, ce site comprend trois rubriques :
- « Inspirations d’artistes » illustre, par une série d’exemples, la diversité des influences, en particulier musicales et cinématographiques, qui irriguent la création artistique.
- « Métiers de la création » fait découvrir, aux jeunes en particulier, la diversité des métiers des industries culturelles grâce aux témoignages de professionnels.
- « Dialogue interculturel » propose des vidéos, des interviews démontrant le lien entre culture et compréhension mutuelle.
Ce site invite les jeunes générations à s’investir pleinement dans la culture : découvrir des répertoires de musique et des cinématographies, mieux connaître la chaîne de valeur des industries culturelles, et surtout donner envie de s’ouvrir aux autres cultures, de partager leurs expériences et émotions artistiques.  
« Culture(s) avec Vivendi » a été mis en ligne le 21 mai 2012 à l’occasion de la Journée mondiale de la diversité culturelle pour le dialogue et le développement, ainsi proclamée par les Nations unies. Vivendi s’est ainsi associé à la campagne Do ONE Thing for Diversity and Inclusion, lancée par l’Alliance des civilisations et en partenariat avec l’Unesco. Cette campagne en ligne appelle chacun et chacune à entreprendre « one thing » – une action – afin de promouvoir la diversité culturelle et célébrer ainsi la journée du 21 mai.

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