Les livres de PPDA baigneraient dans la culture du viol (et c'est édifiant)

Publié le Jeudi 10 Novembre 2022
Maïlis Rey-Bethbeder
Par Maïlis Rey-Bethbeder Rédactrice
Maïlis Rey-Bethbeder aime écrire, le café, traîner sur les réseaux sociaux et écouter de la musique. Sa mission : mettre en lumière les profils, les engagements et les débats qui agitent notre société.
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Les livres de PPDA baigneraient dans la culture du viol (et c'est édifiant)
"Les Inrocks" s'est donné pour mission de relire les livres de Patrick Poivre d'Arvor, accusé par une vingtaine de femmes de harcèlement et de violences sexuelles. Les extraits sont édifiants tant ils baignent dans la culture du viol.
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Trigger warning : certains passages pourraient heurter votre sensibilité.

"Il n'est pas question de condamner un homme par ses romans. Mais nous avons eu la curiosité d'ouvrir les livres de PPDA pour voir quelle vision de la femme, et des rapports hommes-femmes, ils ont véhiculé pendant des décennies", peut-on lire en préambule dans Les Inrocks. Le magazine culturel a eu la curiosité (et la motivation) de se plonger dans les écrits du journaliste star de TF1, accusé de harcèlement et de violences sexuelles par une vingtaine de femmes.

Un travail de fourmi, lorsque PPDA lui-même déclare en avoir écrit "beaucoup, trop peut-être, entre soixante et soixante-dix". Le journaliste affirme également, dans un récit autobiographique paru en 2013 chez JC Lattès, Seules les traces font rêver, ne regretter "aucun" de ses ouvrages.

Les conclusions des Inrocks établissent le portrait d'un écrivain décomplexé avec l'idée du viol, auquel il fait référence dans plusieurs de ses écrits. Ainsi dès son premier roman, Les Enfants de l'aube, paru en 1982, il met en scène son héros Tristan, qui parle à la première personne et impose un rapport sexuel à sa dulcinée Camille lorsqu'elle dort, se "réjouissant" de garder pour lui le secret de ce crime. "Doucement, très doucement, je m'introduisis en elle. Elle ne s'était pas réveillée, mais ses mains cherchaient quelque chose. (...) Je déchargeai en elle des vagues d'amour et de brume et me retirai très doucement. Mais, dis-moi, Tristan, c'est un viol ou un cambriolage...". Quelques pages plus loin : "J'étais très excité par le souvenir de cette nuit, de cet amour par effraction, sans qu'elle le sût".

"Sexe érigé vers sa proie"

Parmi les mots les plus redondants de PPDA pour qualifier les femmes, Les Inrocks relèvent les adjectifs "sotte" et "idiote", ou encore l'expression "oie blanche", qui figent les protagonistes féminines dans la naïveté, l'innocence et la bêtise. Il utilise également le mot "proie", lorsqu'il décrit l'objet du désir de son personnage principal Un héros de passage (Albin Michel, 1996). Le héros en question semble fasciné par une lavandière, "émoustillé par ces fesses gaillardes, provocantes". Il "n'était que désir, que sexe érigé vers sa proie...". Des fesses "responsables" donc de l'excitation d'un homme "prédateur", qui, bien qu'être humain, ne puisse se contrôler...

L'analyse de ces productions n'a évidemment pas pour objet de se substituer à la justice, comme le précisent Les Inrocks : "Nous n'entendons pas convaincre ici de la culpabilité de PPDA pour les faits dont il est actuellement accusé". Mais ces livres témoignent d'une époque où la notion même de culture du viol semblait absente, une époque qui a fait du journaliste un écrivain à succès, très exposé médiatiquement.

La portée des romans de PPDA a pu ainsi atteindre de nombreux lecteurs et lectrices et contribuer à façonner une vision sexiste et patriarcale du rapport hommes-femmes, que nous nous évertuons à questionner désormais.

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