La loi Bachelot est-elle en train de tuer les centres d'IVG ?

Publié le Jeudi 15 Décembre 2011
La loi Bachelot est-elle en train de tuer les centres d'IVG ?
La loi Bachelot est-elle en train de tuer les centres d'IVG ?
Les associations de défense du droit à l'avortement tirent la sonnette d'alarme sur le démembrement des centres d'interruption volontaire de grossesse (CIVG). Dernier en date : le CIVG de l'hôpital Kremlin-Bicêtre, structure modèle dans l'accueil et l'accompagnement des femmes et des mineures, qui pratique près de 900 IVG par an.
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L’Ancic (Association nationale des centres d’IVG et de contraception), la Cadac (Coordination des associations pour le droit à l’avortement et à la contraception), et le Planning familial Île-de-France se mobilisent à nouveau contre la fermeture d’un centre d’IVG en Île-de-France. Le centre autonome de l’hôpital Kremlin-Bicêtre est en passe de disparaître pour être absorbé au sein du service obstétrique-gynécologie. Une restructuration qui fait craindre des réductions de moyens et de personnel pour les actes d’IVG et l’accompagnement nécessaire. En 2010, la même bataille s’était engagée contre la fermeture du CIVG de l’hôpital Tenon (Paris, 20e), et s’est soldée par la réouverture du centre en juillet dernier.
Éclairage avec Danielle Gaudry, membre du bureau national du Planning familial.

Terrafemina : Le centre IVG de l’hôpital Kremlin-Bicêtre doit être démantelé et réintégré au sein de la maternité du groupe hospitalier. Cette décision va-t-elle rendre plus difficile la pratique des IVG ?

Danielle Gaudry : Oui, c’est ce qui inquiète nos associations. Ce centre jouissait d’une gestion relativement autonome et va se retrouver noyé dans un service d’obstétrique, sans une équipe et des locaux dédiés. Pour les femmes, l’accès sera moins confortable et moins évident, mais surtout la gestion du temps, des médecins et des blocs réduira les capacités d’accueil et d’accompagnement. Les conseillères et les médecins de ce centre assurent également une mission d’écoute et de consultations liées à la contraception, tout ce travail de fond sera plus difficile à mettre en œuvre au sein d’une structure d’envergure telle que la maternité du Kremlin-Bicêtre.

TF : La loi « Hôpital Santé Territoires », appliquée depuis 2010, vise à regrouper et restructurer les hôpitaux. En quoi ces dispositions portent-elles atteinte au droit à l’avortement ?

D. G. : Nous ne crions pas au loup sans raison. Nous avons le retour d’expérience d’autres déménagements de CIVG dans des services généraux, et à chaque fois les moyens alloués s’en sont trouvés réduits. La politique de santé actuelle poursuit des objectifs économiques visant à mutualiser les moyens, or l’IVG est un des actes les moins rémunérateurs pour les hôpitaux. La menace sur le droit à l’avortement est réelle, parce que l’accès est rendu de plus en plus compliqué.

TF : En Île-de-France, comment évolue la demande d’interruption volontaire de grossesse ? Les politiques de prévention et les campagnes pour la contraception sont-elles efficaces ?

D. G. : En Île-de-France, la population est très mobile et nous sommes très souvent confrontés à des personnes en situation de précarité qui peinent à avoir une couverture sociale. Pour ces personnes, les campagnes de sensibilisation n’ont pas vraiment d’impact. En réponse aux réorganisations qui ont suivi la loi Hôpital, la Mairie de Paris a ouvert quelques centres de planification pour que les femmes puissent trouver des solutions près de chez elles. Mais certains départements restent très mal desservis en termes de centres IVG, c’est le cas du Val-d’Oise (95), des Yvelines (78), ou en Seine-et-Marne (77). Nous avons récemment fait paraître un manifeste pour demander la généralisation des CIVG dans le cadre d’une médecine de proximité, pour que, même lorsqu’ils sont intégrés à des groupes hospitaliers, ces services disposent d’un personnel dédié, motivé et formé aux nouvelles méthodes et questions relatives à l’avortement.

Lire le manifeste sur le site du collectif pour les droits des femmes


Marie-George Buffet, Danièle Bousquet, Martine Billard, Gaelle Lenfant, Danielle Gaudry et Anne Leclerc le 6 novembre à la manifestation en défense de l’avortement et contre le démantèlement de l’hôpital public / Crédit : Collectif national pour le droit des femmes.

Crédit photo : iStockphoto

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