Des présentatrices afghanes forcées de se couvrir le visage après avoir défié les talibans

Publié le Lundi 23 Mai 2022
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
En Afghanistan, plusieurs présentatrices télé avaient décidé de défier l'ordre des talibans de dissimuler leur visage à l'antenne, couvrant seulement leurs cheveux. Elles ont depuis été forcées de porter le voile intégral, sous peine de sanctions.
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C'est une étape de plus vers l'invisibilisation des femmes en Afghanistan. Nouvel ordre des talibans, au pouvoir depuis août 2021 : exiger des présentatrices qu'elles couvrent leur visage avec un voile intégral ne laissant apparaitre que leurs yeux. Et ce, d'ici le 21 mai. Une mesure que le ministère de la Promotion de la vertu et de la Prévention du vice a récemment appliqué à l'espace public, où les Afghanes sont contraintes de se dissimuler derrière une burqa ou un "tissu grillagé", rapporte TV5 Monde.

Sur les chaînes TOLOnews, Ariana Television, Shamshad TV et 1TV, les concernées ont d'abord résisté. ​"Nos consoeurs craignent que si elles se couvrent le visage, la prochaine chose qu'on leur dira sera d'arrêter de travailler", déplorait la semaine dernière Abid Ehsas, chef des informations de Shamshad TV, comme relaté par le média. "C'est la raison pour laquelle elles n'ont pas respecté l'ordre jusqu'à présent".

Et puis, les pressions se sont faites plus sévères.

"Il n'y a pas d'autre solution"

"Nous avons résisté et étions contre le port" du voile intégral, a affirmé Sonia Niazi une présentatrice de TOLOnews auprès de l'AFP. "Mais TOLOnews a subi des pressions, [les talibans] ont dit que toute présentatrice qui apparaissait à l'écran sans se couvrir le visage devait se voir confier un autre travail".

Des menaces que précise Khpolwak Sapai, directeur de la chaîne. "On nous a dit : vous êtes obligés de le faire. Vous devez le faire. Il n'y a pas d'autre solution", a-t-il déclaré, "J'ai été appelé au téléphone hier et on m'a dit en termes stricts de le faire. Donc, ce n'est pas par choix que nous le faisons, mais contraints et forcés". En solidarité, les hommes ont présenté les informations avec un masque sanitaire recouvrant le bas de leur visage.

Ce n'est pas la première interdiction ciblant l'audiovisuel. En novembre 2021, les chaînes ont été sommées d'interrompre la diffusion des séries ayant des femmes comme protagonistes, ou encore des films ""promouvant la culture et les traditions étrangères".

Le porte-parole du ministère de la Promotion de la vertu et de la Prévention du vice a de son côté affirmé que les autorités ne forceraient pas les présentatrices à démissionner. "Nous sommes heureux que les chaînes aient correctement exercé leur responsabilité", a-t-il ajouté.

A noter que, par ailleurs, les talibans ont ordonné que les employées du gouvernement soient, elles, licenciées si elles ne se pliaient pas au port au nouveau code vestimentaire, informe encore TV5 Monde. Tout comme les employés si leurs femmes ou leurs filles refusent de s'y soumettre.