Société
Pourquoi le retour des talibans fait craindre le pire pour les femmes et les filles afghanes
Publié le 16 août 2021 à 12:36
Par Clément Arbrun | Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
"Les talibans sont entrés dans la ville et nous nous enfuyons. Tout le monde a peur". Alors que les talibans ont repris le contrôle de l'Afghanistan ce week-end, les femmes et les filles afghanes craignent pour leur avenir. Et la panique saisit le pays.
Panique à Kaboul, en Afghanistan, le dimanche 15 août 2021, après l'entrée des talibans dans la ville. Photo de Bashir Darwish. Panique à Kaboul, en Afghanistan, le dimanche 15 août 2021, après l'entrée des talibans dans la ville. Photo de Bashir Darwish.© Abaca
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Parmi près de 250 000 Afghan·e·s forcé·e·s de fuir depuis fin mai (et le retrait des troupes américaines et étrangères) à cause des talibans : 80% sont des femmes et des enfants. C'est ce qu'affirme aujourd'hui le HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, face à la crise humanitaire qui frappe l'Afghanistan. Alors que les talibans ont repris le contrôle du pays ce week-end et ont pénétré dans Kaboul, la capitale, la situation est plus qu'alarmante pour les femmes et les jeunes filles.

Et alors que le président d'Afghanistan aurait quitté le pays, de nombreux citoyens et citoyennes cherchent à s'enfuir, dans une atmosphère de panique généralisée. Embouteillages, cohues auprès des banques, commerces fermés et forces de sécurité afghanes impuissantes composent ce décor. Près de 400 000 civils ont été contraints de quitter leur foyer depuis le début de l'année, alors que des combats continus ont été signalés dans 32 des 34 provinces de l'Afghanistan, détaille l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés.

Mais pour une "écrasante majorité des Afghans", déplore encore le HCR, et donc des Afghanes, il est encore impossible de trouver un lieu sécurisé où se réfugier à l'heure actuelle. Une situation catastrophique.

"Tout le monde a peur"

Et qui amène son lot d'images effrayantes, comme ces photographies d'affiches publicitaires de salon de beauté, et autres représentations féminines, badigeonnées dans le quartier de Kaboul. Comme un rappel des oppressions que les talibans ont fait subir aux femmes lorsqu'ils avaient dirigé le pays de 1996 à 2001 : application du système du tutorat (ce sont les maris, frères et pères qui conservent un contrôle absolu sur les femmes), accès limité à l'éducation des filles et des femmes, fermeture des écoles, restriction de leurs libertés de mouvement au sein du pays, interdiction de certaines tenues, ou encore, port obligatoire de la burqa dans certains districts... La liste est vertigineuse.

"Les talibans sont entrés dans la ville et nous nous enfuyons. Tout le monde a peur", a témoigné dans une vidéo abondamment relayée la réalisatrice afghane Sahra Karimi.

"Ce n'est pas un extrait d'un film d'horreur, c'est la réalité à Kaboul. La semaine dernière, la ville a organisé un festival du film et maintenant, les citoyens s'enfuient pour leur vie. Déchirant à regarder mais le monde ne fait rien", déplore la journaliste et activiste iranienne Masih Alinejad.

Pour l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, l'Afghanistan est en passe de connaître le plus grand nombre de victimes civiles jamais enregistré en une seule année. "Les talibans vont faire régresser la liberté à tous les niveaux et c'est contre cela que nous luttons. Les femmes et les enfants souffrent le plus de cette situation et nos forces essaient de sauver la démocratie", a déclaré à Reuters un porte-parole du gouvernement afghan, comme le rapporte France 24.

Comme le souligne le média, de nombreuses filles et femmes âgées de 12 à 45 ans auraient déjà été contraintes d'épouser des combattants islamistes. Nombreuses sont également les citoyennes à l'avenir professionnel tout aussi incertain. "Pour toute une génération de femmes afghanes qui sont entrées dans la vie publique – les journalistes, médecins, enseignantes... – il y a beaucoup à perdre." Les femmes en question ne peuvent plus travailler et sont aujourd'hui forcées de se cacher.

Derrière les dégâts et l'angoisse, c'est une lourde incertitude qui pèse sur toutes ces vies anonymes. Comme un immense sentiment de gâchis et de recul après 20 ans de guerre.

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