72% des femmes "ne pensent pas demander" d'augmentation à cause de la crise du Covid

Publié le Lundi 16 Novembre 2020
Clément Arbrun
Par Clément Arbrun Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
La condition professionnelle des femmes à l'ère du coronavirus.
La condition professionnelle des femmes à l'ère du coronavirus.
Crise économique et sanitaire, le coronavirus a bien des conséquences. Au sein du monde du travail par exemple, où ses incidences influent sur les attitudes des salariées... et les inégalités. Une récente enquête le démontre d'ailleurs.
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On le sait, le coronavirus exacerbe des discriminations et des violences préexistantes dans notre société - entre les classes et entre les genres. Des inégalités qui se perçoivent dans la sphère médiatique, intime... mais aussi professionnelle. Dans le monde du travail, la crise à la fois sanitaire et économique que nous vivons ne fait effectivement que renforcer l'épaisseur du plafond de verre. Et une récent et édifiant sondage de l'entreprise de coaching Chance le démontre, chiffres à l'appui.

72%. C'est, en pourcentage, le taux de salariées françaises qui "ne [penseraient] pas demander" ou "préféreraient] renoncer à" une augmentation dans ce contexte où leur entreprise a pu pâtir de la crise économique. Et les hommes alors ? A l'inverse, ils seraient 54% à affirmer "qu'ils n'hésiteraient pas à demander une revalorisation salariale" au temps du Covid. Un taux qui en dit long sur la différence de "considération salariale" entre les sexes, comme l'indique encore l'organisme Chance l'espace d'un communiqué officiel.

Et là encore, c'est comme si la Covid-19 avait un "effet-loupe" sur des écarts (trop) systémiques. Ecarts salariaux bien sûr, mais aussi écarts d'estime de soi, de valorisation lors des entretiens, des demandes de promotion ou d'augmentation... D'ordinaire, de la négociation du salaire en entretien d'embauche à la revalorisation salariale en entretien annuel, une femme sur deux se focaliserait davantage sur ses faiblesses que sur ses qualités, nous apprend encore l'entreprise spécialisée en business. Contre seulement un tiers des hommes...

Des "imposteures" à gogo ?

Demander une augmentation, un challenge quand on est une femme ?
Demander une augmentation, un challenge quand on est une femme ?

Un sondage qui inquiète plutôt dans un pays déjà largement touché par les inégalités salariales. Comme le rappelle l'économiste et militante Rebecca Amsellem, créatrice de la newsletter Les Glorieuses, les salariées françaises gagnent en moyenne 85 centimes pour chaque euro que les hommes gagnent. Et au sein des couples avec enfants, elles peuvent gagner jusqu'à 30% de moins que les collègues masculins. On est loin d'une fierté nationale donc. Derrière cette valorisation en baisse, il y a celle que l'on s'accorde à soi-même.

Avec, au coeur du débat, un phénomène qui touche majoritairement les femmes : le syndrome de l'imposteur(e), détaillée par la conférencière Valerie Young dans son livre Les pensées secrètes des femmes qui réussissent : pourquoi les personnes compétentes souffrent du syndrome de l'imposteur et comment prospérer malgré tout. La dévalorisation systématique, et plus globalement la modestie excessive, est une réalité quand il est question de la condition féminine en entreprise. "Les femmes s'accrochent trop à cette hypothèse dépassée selon laquelle leurs réalisations parlent d'elles-mêmes", déplore en ce sens le site de business Entrepreneur.com.

Alors, comment contrer cette absence d'estime au sein de l'entreprise ? Les solutions ne manquent pas. Interrogée par Chance, la responsable en coaching Juliette Sannicolo livre ainsi quelques clés utiles. Par exemple ?

"Toujours préparer ses négociations avec la liste de ses propres réussites - tout ce qu'on apporte à sa structure et à son équipe - sans jamais se comparer aux autres, mais aussi se faire coacher par des hommes de son entourage, et prendre alors conscience qu'on n'a pas du tout la même relation à l'argent, que notre sentiment de culpabilité à demander plus n'est pas du tout aussi prononcé chez les hommes", détaille la spécialiste.

Une révélation de taille qui, selon l'experte, serait "déculpabilisante". Et pourquoi pas ?