#MonPrivilègeHandiPréféré : les personnes handicapées dévoilent leurs combats quotidiens

Publié le Jeudi 04 Juillet 2019
Clément Arbrun
Par Clément Arbrun Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
Le hashtag "Mon Privilège Handi Préféré" propose une libération de la parole salutaire. Getty Images.
Le hashtag "Mon Privilège Handi Préféré" propose une libération de la parole salutaire. Getty Images.
Sur Twitter, les personnes en situation de handicap dévoilent leur quotidien avec le mot-clé #MonPrivilègeHandiPréféré. Des témoignages aussi édifiants que nécessaires.
À lire aussi

C'est un mot-clé qui a déjà généré des dizaines et des dizaines de publications. Sur Twitter, le hashtag #MonPrivilègeHandiPréféré permet aux personnes handicapées de partager leur vécu. L'occasion, pour les internautes dits "validistes" (ou valides), de se rendre compte des nombreuses discriminations qui pèsent sur les personnes en situation de handicap, entre empathie forcée et réflexions déplacées, oppression banalisée et commentaires édifiants.

"On vous propose de lancer le #MonPrivilègeHandiPréféré. Utilisez le hashtag pour nous parler de vos privilèges ! Un des mes préférés: vouloir allez dans ce super nouveau magasin...puis ne pas pouvoir rentrer car pas de rampe !", cingle la militante féministe et en situation de handicap @LeilaWarlock, initiatrice du projet aux côtés de la newsletter et revue Women Who Do Stuff. Et l'instigatrice d'ajouter: "#MonPrivilègeHandiPréféré, c'est de fournir des efforts démesurés pour survivre dans une société qui n'est pas adaptée et qui nous le reproche. C'est d'entendre qu'on préférait mourir qu'être à ma place. Que la sélection naturelle aurait du se faire pour moi".

Nombreuses sont les voix à s'accorder à son indignation. Et ces témoignages sont souvent très durs à digérer.

"Ton corps ne t'appartient pas"

Que révèlent donc ces voix anonymes ? De la condescendance, déjà. Celle de "ces gens qui adressent systématiquement la parole à mon accompagnant et qui me traitent comme si j'avais 12 ans", décoche une internaute. Ou, à l'inverse, une compassion exacerbée venant des "validistes". Par exemple ? "Avoir des câlins n'importe quand par n'importe qui, parce que quand t'es en fauteuil ton corps ne t'appartient plus vraiment", témoigne une twitta en évoquant "ces gens qui ne respectent pas ton intimité et te touchent sans consentement". Des maltraitances médicales à la fatigabilité, des insultes ("être traité de feignasse/parasite par TOUT LE MONDE") à la sensation d'être seul·e au monde, des agressions sexuelles aux abus des employeurs, #MonPrivilègeHandiPréféré brasse les sujets les plus sensibles. Sans filtre.

Au coeur de ces problèmes perdure une ignorance certaine, d'où éclot une "hiérarchisation des handicaps". "#MonPrivilègeHandiPréféré c'est quand des gens se permettent de me juger et de m'afficher comme "faux handi" parce que je peux marcher sans aide sur de courte distances", lit-on en ce sens. Alors que beaucoup font état d'une conception trop limitée du handicap, ce hashtag vient remettre les pendules à l'heure en valorisant les "handicaps invisibles", tels les "acoupheniques, hyperacousiques et malentendant(e)s". Tous ces messages aboutissent à une conclusion aussi logique que trop méprisée : oui, les personnes en situation de handicap sont "des êtres humains, avec des droits". elles doivent être lues, écoutées, prises au sérieux. Respectées.

Les paroles qui se libèrent sont celles des grand·e·s invisibles d'une société où le handicap n'est pas encore considéré comme il se doit. Il suffit pour s'en rendre compte de se balader un après-midi à Paris, entre passages encombrés de trottinettes et boutiques inaccessibles - la dictature des escaliers. Récemment, le réalisateur et producteur Dominique Farrugia fustigeait dans les pages du Parisien l'inadéquation des stations de métros aux personnes à mobilité réduite. Aujourd'hui, les paroles de ces dernières investissent heureusement le champ médiatique. Mais le changement, c'est pour quand ?