A Terrafemina, c'était l'un de nos gros chocs télé.
L'une des séries, à nos yeux, dès sa sortie, les plus phénoménales, audacieuses, mais aussi incarnées, qui soit, et naturellement, comme toutes les fulgurances culturelles de ces dernières années (Promising Young Woman, Fleabag, Girls, Sorry Baby) : l'une des plus féministes ! Cela va sans dire. Et aujourd'hui, Indiewire, site anglosaxon très influent et toujours alerte sur l'actualité ciné & séries, vient d'ériger ce coup de coeur en... Série de la décennie.
Oui, carrément : pour IndieWire, il s'agit de la meilleure série des années 2020. Rien que ça. Pour l'instant, bien sûr. Et cette série s'intitule : I May Destroy You. Un visionnage dont l'on ne sort pas indemne. Mais pourquoi s'y (re)plonger à l'heure de ce sacre critique qui succède à une reconnaissance académique forte ?
The Underground Railroad, Reservation Dogs, The Rehearsal, Normal People, Pachinko...
On trouve de belles curiosités, joliment précises pour certaines - Normal People étant la plus populaire de toutes - dans le très exigeant Top Séries érigé par IndieWire. Un panorama pointilleux et passionnant d'une culture séries qui ne se limite pas aux blockbusters du genre...
Et la reine de toutes, donc : I May Destroy You.
Pourquoi tant d'éloges ? C'est simple...
Michaela Coel dans "I May Destroy You" - showruneuse, créatrice, actrice principale - incarne une victime de viol qui peu à peu, affronte son traumatisme, qu'elle ressasse, et dont elle va progressivement reconstituer les morceaux, au lendemain d'une soirée dans un bar, le relate, et se reconstruit, difficilement, par étapes.
Le récit se narre par flash backs, mais la fiction s'éprouve dans l'instant, comme un témoignage de son temps, empreint de female gaze, de sororité, d'idées qui sont autant de gestes militants, profondément féministes. Et surtout : d'expériences personnelles, qu'elles aient trait aux traumas, ou au sexe. Michaela Coel s'est énormément inspirée de sa propre vie.
Le choc au visionnage passe par une myriade d'ingrédients : l'émotion, certes, brut, mais aussi les tonalités, audacieuses, polymorphes, la capacité d'incarnation de la comédienne et scénariste, et la propension à aborder autant de sujets casse-gueule et si fondamentaux dans une société post #MeToo. C'est bien simple, on ne s'est pas tari de qualificatifs à l'époque, ni d'éloges.
"Il y a des séries pierres angulaires : elles sont rares, précieuses. S'il est encore trop tôt pour éprouver l'empreinte qu'elle laissera dans le panthéon télévisuel sur la durée, I May Destroy You semble avoir les atouts pour devenir un nouveau jalon de cette drôle d'époque", pouviez-vous lire alors sur Terrafemina." Libre et cash, inclusive et féministe, la nouvelle série de la showrunneuse Michaela Coel (qui avait déjà créé Chewing Gum pour Netlix en 2015) atomise les codes avec une écriture aussi vive que radicale".
"Comme Lena Dunham avec ses Girls ou la Fleabag de Phoebe Waller-Bridge, la jeune prodige britannique s'impose comme une défricheuse et l'une des voix les plus importantes de cette année 2020. Si la question du consentement et l'exploration de la fameuse "zone grise" constituent les pivots de la série, Michaela Coel (qui s'est inspirée de sa propre agression sexuelle) s'autorise à pulvériser d'autres tabous avec une liberté inouïe : le sexe pendant les règles, la représentation du viol masculin, le retrait non consenti du préservatif, l'amnésie traumatique."
Bref, déjà un classique, quelques années à peine après les premières diffusions, et une oeuvre qui, on s'en doute, n'a pas fini de marquer, et d'influencer, les futures créateurices engagées.