Jugée "trop masculine" pour être violée, le tribunal acquitte les accusés

Publié le Mardi 12 Mars 2019
Marguerite Nebelsztein
Par Marguerite Nebelsztein Journaliste
Le drapeau italien
Le drapeau italien
En 2017, deux hommes accusés de viol ont été acquittés en Italie parce que les trois juges ont estimé que la plaignante était "trop masculine" pour être agressée. La cour suprême italienne appelle à un nouveau procés.
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En Irlande, en novembre 2018, un homme de 27 ans avait été acquitté du viol d'une mineure de 17 ans. Son avocate avait réussi à gagner le procès en expliquant que la victime ... portait un string. Aujourd'hui en Italie, c'est un nouvel argument fallacieux qui a amené à la décrédibilisation d'une victime.

Deux hommes ont été blanchis du viol d'une femme. Les trois magistrates ont estimé en appel qu'elle avait l'air "trop masculine" pour que les deux hommes l'agressent. Ils avaient été condamnés en première instance à cinq et trois ans pour violences sexuelles.

La jeune Péruvienne, qui avait 22 ans au moment des faits en 2015, est depuis rentrée dans son pays d'origine après avoir été ostracisée dans la ville d'Ancône, dans le centre-est de l'Italie, pour avoir dénoncé ses deux agresseurs.

Ce premier jugement datait de 2017, mais la cour suprême italienne vient de décider de rejuger ce cas le 8 mars.

Cinzia Molinaro, l'avocate de la victime présumée, explique au Guardian : "C'est en lisant la décision en 2017 que j'ai décidé de saisir la cour suprême".

Au moment du jugement, où les trois juges étaient toutes des femmes, les accusés ont expliqué ne pas être attirés par la plaignante, l'un des accusés l'ayant enregistrée dans son téléphone sous le nom "Viking".

L'avocate de la jeune Péruvienne raconte son incompréhension face au verdict : "C'était dégoûtant à lire. Les juges ont exprimé diverses raisons pour décider de les acquitter, mais l'une d'elles était que les[accusés] ont dit qu'ils ne l'aimaient même pas, parce qu'elle était moche. Ils ont aussi écrit qu'une photo[de la femme] reflétait ceci."

Au moment du viol présumé, accusés et plaignante avaient bu des verres après les cours. Les médecins ont retrouvé dans le sang de la présumée victime des somnifères qu'elle ne se souvient pas avoir pris et de l'alcool. Elle portait également des blessures compatibles avec un viol.

La résurgence de cette histoire datant de 2017 a entraîné une manifestation de 200 personnes ce lundi (11 mars) devant la cour d'appel d'Ancône dans le centre-est de l'Italie.

Le Rebel Network en est à l'initiative. Sur leur page Facebook, les militantes ont écrit : "C'est un moment où les clics sur le clavier ne suffisent plus et il faut descendre dans la rue pour défendre les plus faibles, les victimes et notre constitution !".

Le groupe parle de "honte pour l'Italie" et demande "une réponse collective de la part des citoyens".

Le prochain procès se tiendra dans la ville de Pérouse à une date qui reste indéterminée.