Matthieu Delormeau avait il y a peu ému sur le plateau de Cyril Hanouna.
En abordant son rapport aux addictions, il avait fait l’objet d’une séquence télévisuelle particulièrement remarquée, quand bien même d'aucuns fustigeaient sur les réseaux sociaux "un mélodrame" ou "un instant pathos". Las, l’animateur en revient aujourd’hui aux ingrédients phares des émissions de “Baba” : humiliation, stigmatisation, insultes et humour gras, sous prétexte de dénonciation.
Et ce, malgré la surveillance du CSA, et les très nombreuses controverses liées par le passé aux “débats” et “blagues” inhérentes aux programmes de Hanouna. Homophobie, misogynie, agressions sexuelles, on se souvient de ces indénombrables délits… Matthieu Delormeau de son côté coche une autre case : transphobie.
L’espace d’un happening lunaire il s’est ainsi amusé, sous couvert de "critique sociale", à railler le changement de genre des personnes trans : "Est-ce que tu sais qu'il y a des gens, je vous promets que c'est vrai, qui changent de genre selon le jour. Ils arrivent dans une société, tu peux avoir un prud'homme”, a-t-il abordé à Cyril Hanouna, d'un air vraisemblablement très inquiet.
“Le lundi matin, il arrive et tu dis 'Bonjour Martine', 'Non, aujourd'hui, je suis Olivier.' Mais enfin, qu'est-ce que c'est ?", se réjouit encore l’animateur, dans la séquence à retrouver ci-dessous.
Une subtilité d’écriture qui à n’en pas douter ravira les réactionnaires.
Mathieu Delormeau aligne ici les propos transphobes.
Autrement dit : il mégenre (attribuer à une personne trans un genre qui n’est pas le sien, comme dire d’une femme transgenre qu’elle n’est pas une femme), il emploie le “deadname” (le prénom qu’une personne trans a reçu à la naissance, élément rhétorique régulièrement employé pour humilier les personnes trans), il ironise sur le prétendu danger que représenteraient les personnes concernées (“avoir un prud’homme”).
Car il est vrai qu’en cette époque de recrudescence des violences misogynes, des féminicides, et alors que le masculinisme connaît un véritable essor, sur les réseaux sociaux et notamment auprès des plus jeunes, quelle plus grande menace que les personnes transgenres, autrement dit des personnes stigmatisées, discriminées et assassinées pour ce qu’elles sont ?
La transphobie est punie par la loi, comme l’homophobie.
La transphobie tue, également. Car c'est un crime de haine. Oui. Pas juste un réservoir à blagues.
On pense à l'assassinat au Royaume-Uni de Brianna Ghey, dont les auteurs ont été jugés au tribunal : la jeune femme a été victime d'un "crime de haine", assassinée car transgenre, dans un pays où la police aurait enregistré 2 630 crimes haineux contre des personnes trans. L’an dernier, de nombreux rapports comme ceux de Sos Homophobie alertaient : la transphobie s’exacerbe en France, où le nombre de violences commises à l'encontre des trans aurait augmenté de 27 % en un an, selon une étude de SOS Homophobie, prenant en considération les témoignages de 1 506 personnes.
Ravivons à ce sujet ces mots d’Enora Malagré : "Aujourd'hui il y a une meilleure visibilité des personnes trans, on le voit dans la fiction. Mais la loi n'a pas changé, et les personnes concernées sont encore exposées à la discrimination. "7 % de la population connaît une personne trans. On peut les aider en contribuant à des cagnottes car les opérations médicales relatives à la transition sont très mal remboursées et coûtent énormément d'argent".