Le plus grand marché de viande de chien en Corée du Sud va (enfin) fermer ses portes

Publié le Jeudi 22 Décembre 2016
Hélène Musca
Par Hélène Musca Rédacteur
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Moran Market, le plus grand marché aux chiens sud-coréen, va enfin fermer ses portes
Moran Market, le plus grand marché aux chiens sud-coréen, va enfin fermer ses portes
En Asie, des millions de chiens sont détenus et abattus dans des conditions terrifiantes de cruauté afin d'être mangés. Mais la décision de la Corée du Sud de fermer le Moran Market, le plus grand marché de viande de chien du pays, devrait freiner ce commerce de l'horreur.
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C'est un petit pas en avant, mais qui représente beaucoup : le marché Moran, dans la ville de Seongnam en Corée du Sud, va enfin arrêter l'abattage et la vente de viande de chien. Cette coutume de manger de la viande de chien remonte aux temps anciens où la Corée était une société agricole. À l'époque, la viande canine a été considérée comme une sorte de médecine. Elle a été maintes fois dénoncée pour la cruauté et la violence avec lesquelles étaient traités les animaux.

Malgré cela, d'après les chiffres d'une association de protection des animaux coréenne IAKA, près de 20 000 enseignes servaient encore de la viande canine dans le pays tandis que chaque année, les Sud-Coréens abattent et mangent entre 1,5 et 2,5 millions de chiens issus de 17 000 élevages repartis dans le pays. A Moran, le plus grand marché du pays en la matière, des centaines de chiens étaient quotidiennement tués dans d'atroces souffrances sur la place publique.

La fermeture de cet abattoir à ciel ouvert est donc éminemment symbolique, et laisse à espérer que l'approche des Jeux Olympiques permettront de faire progresser la cause animale dans un pays qui cherche par tous les moyens à redorer son image.

Le Moran Market : des chiens pendus et électrocutés au quotidien

Les chiens vendus au Moran Market, parqués dans des cages en attendant d'être tués
Les chiens vendus au Moran Market, parqués dans des cages en attendant d'être tués

"La grandeur d'une nation et ses progrès moraux peuvent être jugés par la manière dont elle traite les animaux" : c'est en reprenant cette citation de Gandhi que Lee Jae-myung, le maire de la ville de Seongnam, en Corée du Sud, a expliqué au Korea Herald sa décision d'arrêter l'abattage et la vente de la viande de chien au marché Moran. Pour les associations de défense des animaux, qui se battent depuis des décennies pour faire cesser cette pratique ancrée dans les traditions asiatiques, c'est une victoire de taille : chaque année à Moran, près de 80 000 chiens étaient commercialisés pour leur viande.

Entassés par dizaine dans de minuscules cages grillagées dans lesquels ils ne pouvaient même pas bouger, souvent blessés et affamés, les chiens étaient vendus vivants ou tués sur le marché, pendus, électrocutés ou souvent même ébouillantés vifs, puisque comme l'explique John Dalley de la Soi Dog Foundation, à ABC News : "En Corée, on pense que la douleur infligée au moment de la mort rend la viande de chien plus savoureuse".

Si la plupart des animaux sont issus d'élevages spécialisés, il ne faut pas négliger parmi eux le nombre de chiens domestiques, volés avant d'être revendus à bon prix sur le marché noir. La fermeture de cet emblème coréen du commerce de viande de chien, qui fournissait un tiers de la viande de chien du pays, est donc une avancée considérable. Après un accord longuement négocié, les 22 commerçants de viande de chien du Moran Market devront progressivement fermés leurs échoppes d'ici mai prochain. Comme le rapporte le site Mashable, ils seront soutenus financièrement par la mairie de Seongnam afin de pouvoir entamer une reconversion professionnelle.

Progrès véritable ou coup de pub médiatisé ?

Cependant, si les associations de protection des animaux se félicitent de ce progrès, elles restent néanmoins sur leurs gardes. La Korean Wellfare Animal Association, qui a beaucoup milité contre la vente de viande de chien, craint qu'une telle interdiction soit difficile à faire respecter et que le commerce se poursuive mais de manière illégale. "Nous devrons surveiller constamment les enseignes qui vendaient de la viande de chien pour voir si elles auront vraiment cessé de les abattre", a expliqué un porte-parole de l'association interrogé par le Korea Herald.

La consommation du chien est en effet solidement intégrée à la culture asiatique, notamment parce qu'une croyance folklorique populaire lui confère des propriétés aphrodisiaques : les hommes âgés ou ayant des problèmes d'érection pensent que s'ils en mangent, ils pourront "retrouver" toutes leurs capacités sexuelles, comme l'explique le blogueur sud-coréen Pierre Joo.

De plus, il semblerait que cette décision ait davantage été motivée par la volonté de redorer l'image de la Corée à l'approche des Jeux Olympiques de 2018, qui se tiendront à Pyeongchang, que par une réelle volonté de mettre un terme à cette pratique cruelle et barbare. "L'accord permettra, nous l'espérons, d'en finir avec l'image négative du Moran Market", a d'ailleurs confié le maire de la ville lorsqu'il a annoncé la fermeture du marché. Une réunion entre les associations de défense des animaux et les vendeurs de viande canine se tiendra en janvier 2017, afin de faire un point sur la situation.