On en a assez des commentaires haineux entre femmes sur les réseaux sociaux

Publié le Lundi 29 Juillet 2019
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
On en a assez des commentaires haineux entre femmes sur les réseaux sociaux
On en a assez des commentaires haineux entre femmes sur les réseaux sociaux
Il y a quelques jours, nous avons remarqué un flot de haine à l'encontre de Béatrice Dalle. Des commentaires qui se sont glissés sous un article qui rapportait son choix de ne pas avoir d'enfants. Des phrases signées pour la plupart par des femmes, et qui ciblaient aussi son physique. Il est temps d'arrêter de se descendre de façon aussi acerbe.
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Il y a quelque temps, nous avons rédigé un article qui portait sur une déclaration de Béatrice Dalle. L'actrice s'exprimait sur son non-désir d'enfants au micro de Léa Salamé, dans l'émission Femmes Puissantes de France Inter. Si le propos n'avait rien de choquant (une femme a le droit de faire ce qu'elle souhaite de son corps et plus particulièrement de son utérus), certains des commentaires qui ont suivi la publication de l'article sur Facebook nous ont quant à eux filé la nausée. Et on pèse nos mots.

Des critiques acerbes qui jugeaient sa capacité à être une bonne mère selon son physique, qui estimaient que "c'était mieux pour sa progéniture" qu'elle n'ait pas voulu se reproduire, et autres insultes dégradantes qui frisaient le signalement. Ce qui nous a marqué·es, au-delà de la violence des expressions utilisées, c'est que la plupart de ces commentaires venaient de lectrices. Et que ce n'est pas la première fois que l'on assiste à un lynchage verbal de la part de plusieurs femmes à l'encontre d'une autre. L'occasion de faire une petite mise au point de solidarité féminine. Et de rappeler quelques faits.

Arrêtons de nous descendre les unes les autres, la société s'en charge déjà

L'une des grandes réussites du système patriarcal a été de faire croire aux femmes que leur beauté et leur valeur aux yeux des hommes les définissaient. Depuis des siècles, on passe donc notre temps à jalouser, envier, détester nos voisines considérées comme "plus belles" que nous, par peur de la menace qu'elles représentent dans la société (ou dans le coeur de ces messieurs). Et quand bien même on ne les jugerait pas assez séduisantes pour les craindre, on s'efforce tout de même de trouver des défauts - physiques ou non - pour les critiquer. Comme si les laisser exister en paix nous semblait impossible. De l'enfance à l'âge adulte, en passant par l'adolescence, les femmes prennent plaisir à se déchirer entre elles. C'est vieux comme le monde, et ça ne fait certainement pas avancer la cause.

Car tant qu'on consacrera du temps à rabaisser l'autre pour ce qu'elle dit ou est, on ne le passera pas à établir un climat de bienveillance au sein de notre genre, et encore moins à se battre pour nos droits. Loin de nous l'idée de dire "amen" à tout ce que dit ou fait une femme pour la simple raison qu'elle possède un vagin, ou se considère comme telle, mais les idées devraient primer sur l'apparence. Et notre critique être davantage construite qu'injustement haineuse.

Surtout, s'insulter et se dénigrer entre nous donne une bonne excuse à de nombreux hommes de faire de même. Même si la masculinité toxique est clairement à l'origine de ce comportement féminin quand on y réfléchit - "diviser pour mieux régner", comme disait Louis XIV -, autant ne pas leur faciliter la tâche niveau sexisme plus ou moins ordinaire. En instaurant une atmosphère nocive entre femmes, on participe non seulement à faire prospérer cette inégalité des sexes qui n'a plus sa place en 2019 - et qui ne l'a jamais eue, que ce soit clair -, mais aussi à empêcher nos pairs de s'émanciper.

Parce que l'union fait la force, arrêtons une bonne fois pour toutes d'apporter de l'eau au moulin de la violence verbale féminine et essayons une autre technique : l'empathie et le discernement de ce qui vaut vraiment la peine d'être dit, ou non.

Bien sûr, on plaide coupable de parfois se laisser aller à quelques commentaires désobligeants, personne n'est parfaite. Mais l'important reste de tenter le changement. Et vous verrez, l'adage "tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler" se troque très facilement pour "tourner sept fois ses doigts sur son clavier avant de taper".

Sororalement vôtre,

La rédaction.