Les plaignantes de Norman brisent le silence.
Deux ans après le classement sans suite des plaintes pour viols et corruption de mineurs, déposées à l'encontre de Norman Thavaud (alias "Norman fait des vidéos" sur Youtube), Médiapart publie une enquête. Les journalistes Sarah Brethes et Laura Wojcik ont épluché plus de 1400 pages de l’enquête judiciaire, recueilli le témoignage des plaignantes qui maintiennent leurs accusations, et obtenu une déclaration de la part du Youtubeur.
Avant toute chose, voici un rappel de l'affaire :
Pour rappel, Norman Thavaud, avait été placé en garde à vue le 5 décembre 2022 pour viol et corruption de mineurs. Sa garde à vue avait été levée le lendemain mais l'enquête préliminaire ouverte par le parquet de Paris se poursuivait après que six femmes avaient porté plainte contre le youtubeur. En 2023, l'affaire avait été placée sans suite par le parquet de Paris.
Parmi les plaignantes, Maggie Desmarais. La jeune Québécoise, âgée de 16 ans au moment des faits, avait accusé le youTubeur de manipulation et d'emprise, rapportant sur Instagram des captures d'écran de messages incriminants. Elle accusait Norman Thavaud, alors âgé de 30 ans, de l'avoir incitée à lui envoyer des messages et des photos à caractère sexuel.
La jeune femme s'était exprimée dans les médias au sujet de cette affaire, notamment sur Urbania, en 2021. Auprès du média, elle décrivait un envoi de photos "de plus en plus osées", ainsi que l'attitude "problématique" du vidéaste, "de plus en plus insistant".
D'autres jeunes femmes expliquaient à l'époque avoir également reçu des demandes similaires, certaines indiquant qu'elles étaient elles aussi mineures au moment des faits.
Entendu en garde à vue en décembre 2022, Norman Thavaud n’avait - selon le parquet - "pas contesté la matérialité des faits, mais l’absence de consentement". L’enquête le visant avait été classée sans suite, au motif que "les infractions étaient insuffisamment caractérisées".
Le youtubeur avait fait son retour sur Youtube le 11 août 2024. Après près de deux ans de silence, il s'était adressé face caméra à ses 11,4 millions d'abonnés, martelant : "Je ne suis plus présumé innocent, je suis innocent".
Ce sont les mots de Norman Thavaud dans cette vidéo Youtube qui auraient poussé les plaignantes à prendre la parole auprès de Médiapart.
"Ces jeunes femmes décrivent un chantage et une mécanique de prédation mises en place par une star, face à des adolescentes impuissantes à lui refuser photos dénudées et faveurs sexuelles", déclare la journaliste Sarah Brethes dans une vidéo publiée sur TikTok et Instagram le 24 juin.
Dans cette publication introduisant l'article, on entend notamment la voix d'une plaignante, nommée Léonie : "Tous les hommes qui ont été accusés de violences sexuelles ont le même mécanisme. A chaque fois ils retournent la situation pour se faire passer eux pour les victimes", souligne-t-elle. Quand au classement sans suite de l'affaire ? "Pour moi la décision elle a été incompréhensible. Je ne m'y attendais pas, j'étais tellement sûre qu'il allait y avoir un procès", regrette-t-elle.
Contacté par Médiapart, le Youtubeur maintient quant à lui qu'il n'a commis aucun viol ni corruption de mineurs, mais il admet "pour la première fois publiquement des erreurs et des fautes sur le plan moral". Tels sont ses propos recueillis par le média d'investigation : "Je m'excuse pour mon absence d'empathie et pour mon inconscience. Pour moi c'était un jeu un peu virtuel, j'étais à côté de la plaque."