Megan Rapinoe devient égérie de la marque de lingerie Victoria's Secret (et on est perplexe)

Publié le Vendredi 18 Juin 2021
Louise  Col
Par Louise Col Journaliste
La championne de foot américaine et icône lesbienne Megan Rapinoe devient aux côtés d'artistes inspirantes et mannequins grande taille la nouvelle égérie de la marque de lingerie controversée Victoria's Secret. De quoi se réjouir ? On s'interroge.
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"Je suis ravie et prête à m'associer à Victoria's Secret. J'ai hâte de travailler avec ces femmes que j'admire pour rappeler à TOUTES les femmes leur beauté et leur pouvoir, individuel et collectif". Ainsi s'est exprimée l'une des nouvelles égéries de la célèbre marque de lingerie : Megan Rapinoe, capitaine de l'équipe féminine américaine de football. Un choix étonnant que celui de la championne, icône lesbienne et activiste anti-Donald Trump.

En tant que nouvelle ambassadrice, Megan Rapinoe côtoie six autres femmes dites "inspirantes" nommées à l'unisson, remplaçant les fameux "Anges" de la maison. Parmi lesquelles, la mannequin grande taille et militante body positive Paloma Elesser, l'actrice et mannequin indienne Priyanka Chopra Jonas, la skieuse acrobatique américano-chinoise et double championne du monde Eileen Gu ou encore la mannequin trans Valentina Sampaio. L'idée ? "Redéfinir la façon dont le monde envisage le mot sexy", souligne le site spécialisé Give Me Sport. En somme, privilégier un "sexy" engagé, totalement inclusif et stimulant.

Une nouvelle enthousiasmante ?

La mise au ban de la tradition des "Anges", au physique normée, au profit de profils plus body positive, diversifiés et inspirants... Une (r)évolution pour l'un des noms les plus évocateurs de l'industrie de la lingerie, pourrait-on penser. C'est d'ailleurs ce que saluent des dizaines de milliers d'internautes sous la publication Instagram de Megan Rapinoe : "Ca, c'est mon type d'anges", "C'est incroyable", "Iconique", peut-on notamment lire.

Or, cette nouvelle laisse également perplexe. On est en droit d'y voir une volonté de feminism-washing (un féminisme opportuniste et mercantile qui n'a de féminisme que le nom), et donc une envie de faire bonne figure, de la part d'une entreprise qui depuis des années essuie scandale sur scandale. Exemples ? Les propos transphobes d'Ed Razek, ancien directeur marketing de Limited Brand (maison mère de la marque), en 2018, déclarant : "Ne devrions-nous pas faire défiler des modèles trans ? Non, je ne pense pas que nous devrions. Et pourquoi pas ? Parce que le show est un fantasme. C'est une émission spéciale de 42 minutes. Voilà ce que c'est".

Ou encore, les révélations accablantes du New York Times, ayant recueilli l'an dernier de nombreux témoignages de harcèlement sexuel de la part d'employées et anciennes employées de Victoria's Secret, visant là encore l'ancien directeur marketing de L Brand. Patron abusif, harcèlement sexuel, propos déplacés, avances diverses, abus de pouvoir, réflexions sur le physique... Des dessous qui n'ont rien de très sexy.

Alors, la mise en avant d'un casting plus inclusif et riche de sens suffira-t-elle à convaincre celles et ceux qui n'envisagent guère la dimension progressiste de Victoria's Secret alors que la griffe est en perte de vitesse face à des marques plus inclusives ? Il y a de quoi s'interroger.