"Les femmes ne parlaient pas" de PPDA selon Jacques Legros : mais les aurait-on écoutées ?

Publié le Mardi 31 Mai 2022
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
Le journaliste Jacques Legros, dont le bureau était à côté de celui de PPDA à TF1, s'est exprimé pour la première fois au sujet des accusations de violences sexuelles qui ciblent son ancien collègue. Selon lui, "les femmes ne parlaient pas". Mais a-t-on seulement tenté de les écouter ?
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Au micro de RTL dans l'émission On refait la télé, le présentateur de TF1 Jacques Legros est revenu sur l'affaire PPDA, accusé de viols et d'agressions sexuelles par 20 femmes. "J'aurais pu être l'un des premiers au courant. J'avais mon bureau pas loin, on se croisait. Je connaissais bien son entourage, ses rédacteurs en chef, son assistante", se souvient le journaliste.

Eric Dussart, qui co-anime l'émission avec Jade, l'interroge alors sur les déclarations des dirigeants du groupe qui affirment ne pas avoir eu connaissance des faits présumés (l'ancien DRH et PDG de la chaîne, Nonce Paolini, ou encore l'actuel présentateur du JT Gilles Bouleau). "Ca ne m'étonne pas", commente Jacques Legros. "Moi-même, je ne savais pas". Et de poursuivre : "Aujourd'hui, on a un respect pour les femmes qui me paraît élémentaire et j'ai envie de dire enfin, mais à l'époque elles ne parlaient pas non plus. Et ce n'est pas un reproche".

Pas un reproche, mais plutôt le signe d'un environnement hostile à leur témoignage, où la honte et la pression à se taire étaient si présentes que les victimes présumées ne se sont pas senties en sécurité pour parler, ont craint les conséquences face à une figure si intouchable de la télévision. Ou bien, on ne les a simplement pas écoutées.

"Personne n'a voulu m'écouter"

C'est cette impunité et cette inversion de culpabilité qu'a notamment confiée Marie-Laure Eude-Delattre, sur le plateau de Mediapart le 10 mai dernier. "J'ai été violée par Monsieur Patrick Poivre d'Arvor en 1985. J'avais 23 ans, et j'ai mis 36 ans à porter plainte". A l'époque, elle cherchait un stage sur la seconde chaîne. Le présentateur l'a invitée dans sa chambre d'hôtel.

"Il a fermé la porte à clé. Et là je l'ai vu nu comme un vers, qui se frottait sur le canapé. J'étais dans un état de sidération, je n'ai pas bougé. Je me souviens que j'étais allongée, qu'il m'a enlevé mon pantalon, ma culotte, qu'il est rentré. C'est tout ce qui s'est passé". Elle conclut, émue aux larmes : "Ce qui m'est arrivé, c'est un viol, juste un viol, quelque chose de monstrueux". Quelque chose qu'elle a immédiatement raconté. Seulement, "personne n'a voulu m'écouter".

Une autre plaignante, Emmanuelle Dancourt, journaliste à RMC et présidente de l'association #MeTooMédias, confiait à Terrafemina : "TF1 n'a absolument pas protégé ces femmes, s'abritant derrière sa 'drague lourde'. Ils auraient dû être alertés, mener l'enquête et ils ne l'ont pas fait parce que politiquement et économiquement, PPDA était trop important. Et tout le monde savait : il avait des 'invitées' quasiment tous les soirs. C'est dommage, prendre les choses en main les sortirait par le haut."

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