La pub pour maillots pas finaude d'Etam fait bondir

Publié le Jeudi 07 Juin 2018
Marguerite Nebelsztein
Par Marguerite Nebelsztein Journaliste
Est-ce possible d'utiliser la nudité et la liberté sexuelle pour vendre tout et n'importe quoi ? Spoiler Alert : non. La preuve avec cette campagne de pub Etam.
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Le compte Twitter Pépites Sexistes recense, entre autres, les campagnes de pubs qui portent atteinte à l'image des femmes. Cette fois-ci, il s'est attaqué à la nouvelle campagne de la marque de lingerie Etam "Bain de minuit" qui met en scène (ou plutôt pas du tout) des maillots de bain.

Sur les photos, les mannequins sont tout nus et sautent dans les vagues. Point de maillot de bain en vue donc, mais juste la marque de bronzage qu'une journée à la plage aurait laissée. On peut se demander à ce niveau-là de nudité pourquoi les photos n'ont pas été censurées sur les réseaux sociaux tant Instagram et Facebook y sont ultra-sensibles.

Quelques internautes ont souligné la flemme intellectuelle qui entoure cette démarche publicitaire.

Cette publicité n'est qu'une brique parmi d'autres pour la marque Etam qui, en mai dernier, avait lancé son nouveau slogan #FrenchLiberté et Libre et culottée.

Sur Instagram, la marque a répondu aux commentaires négatifs (et à ceux et celles qui l'accusent de ruiner la prévention contre le cancer de la peau en faisant la promotion du bronzage) : "Nous sommes désolés que cela vous ait offensé. L'idée avant tout est de mettre en avant le plaisir du bain de minuit, un moment de liberté pour chacun. Nous pouvons observer des marques de bronzage car pendant l'été nous prenons des couleurs et cela tout en se protégeant !"

Mais non, on ne peut pas surfer sur la nudité pour évoquer la liberté ou la libération sexuelle. Monoprix dernièrement a essayé de récupérer le cinquantenaire de mai 68 pour faire des promotions. Non, cela n'est pas possible de s'approprier à ce point une lutte étudiante et ouvrière. C'est indécent. Surtout pour un groupe qui n'est pas irréprochable socialement. Pareil pour les t-shirts proclamant des slogans féministes fabriqués par des ouvrières sous-payées à l'autre bout du monde.

La "liberté" et le "cool", c'est ce sur quoi une marque comme Apple s'est construite depuis ses débuts. Sauf que les consommateurs sont accros et presque parfois dépendants à ses produits comme le racontait un documentaire d'Arte en 2011 intitulé "La tyrannie du cool". A l'époque, le dossier de presse du film résumait très bien ce qu'Etam tente de faire aujourd'hui : "Digne héritière de la contre-culture des années 1960, l'entreprise Apple prône la libération de l'individu, l'appartenance à une communauté, l'outil à hauteur d'homme et dédié à son émancipation. Et pourtant. Derrière se révèle une douce tyrannie. Celle de l'individualisme, du consumérisme de l'engagement et de la disparition du sens critique." On se rappelle aussi de la pub de Pepsi avec Kendall Jenner qui avait récupéré de façon éhontée le mouvement Black Lives Matter. Non, la lutte contre le racisme n'est pas "cool".

Rappelons également qu'Etam arrête ses tailles au... 44. Or, la taille moyenne des femmes est de 42. Cela veut dire que 50 % des femmes font du 42 et plus. Les mannequins (dénudés) de cette publicité pour maillots de bain sont donc très loin de représenter les femmes françaises moyennes. Si Etam avait vraiment voulu faire dans l'original, elle aurait pu explorer cette piste du body positive.

Donc on reste calme, Etam, vous ne nous vendez pas de la liberté, mais des bouts de tissus. Chacun son métier.