Société
Greta Thunberg vient de refuser une récompense pour une très bonne raison
Publié le 31 octobre 2019 à 12:34
Par Clément Arbrun | Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
Lorsque la jeune militante écologiste Greta Thunberg refuse un prix saluant sa défense de la planète, on se doute bien que cela n'a rien d'un geste anodin. Et l'intéressée le démontre avec éloquence, l'espace d'un post Instagram.
L'activiste écologiste Greta Thunberg. L'activiste écologiste Greta Thunberg.© BestImage
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N'en déplaise aux haters, l'intégrité de Greta Thunberg n'a d'égale que son engagement. Voyez plutôt : la jeune militante écologiste s'est récemment vue couronnée par le prestigieux prix environnemental du Conseil nordique de Stockholm. Le symbole idéal pour saluer ses luttes. Mais l'intéressée a décidé de refuser cette gratification. Et, le temps d'une escale californienne, elle explique pourquoi, sur son compte Instagram : "C'est un immense honneur. Mais le mouvement pour le climat n'a pas besoin de plus de récompenses".

A la lire, ces reconnaissances bien intentionnées n'ont rien d'une priorité. Non, "ce dont nous avons besoin", écrit-elle, "c'est que les politiciens et les membres du pouvoir" se décident enfin "à agir en accord avec la science". Et s'alarment quant à leurs fâcheuses inactions. Pour la militante, il est ainsi curieux de voir les pays nordiques jouir d'une grande réputation mondiale en matière de climat et d'environnement à l'heure où le gouvernement norvégien vient pourtant d'octroyer "un nombre record de permis de recherche de nouveaux gisements de pétrole et de gaz". De quoi générer de considérables émissions de CO2.

Peu importent les prix et autres récompenses pour Greta Thunberg, puisque l'heure n'est pas vraiment à la célébration. Sur Instagram, elle cingle encore : "Nous appartenons aux pays qui ont la possibilité de faire le plus et pourtant, fondamentalement, nos pays ne font toujours rien". Une vérité qui dérange...

"Aucun signe de changement"
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I have received the Nordic Council's environmental award 2019. I have decided to decline this prize. Here's why: "I am currently traveling through California and therefore not able to be present with you today. I want to thank the Nordic Council for this award. It is a huge honour. But the climate movement does not need any more awards. What we need is for our politicians and the people in power start to listen to the current, best available science. The Nordic countries have a great reputation around the world when it comes to climate and environmental issues. There is no lack of bragging about this. There is no lack of beautiful words. But when it comes to our actual emissions and our ecological footprints per capita - if we include our consumption, our imports as well as aviation and shipping - then it's a whole other story. In Sweden we live as if we had about 4 planets according to WWF and Global Footprint Network. And roughly the same goes for the entire Nordic region. In Norway for instance, the government recently gave a record number of permits to look for new oil and gas. The newly opened oil and natural gas-field, "Johan Sverdrup" is expected to produce oil and natural gas for 50 years; oil and gas that would generate global CO2 emissions of 1,3 tonnes. The gap between what the science says is needed to limit the increase of global temperature rise to below 1,5 or even 2 degrees - and politics that run the Nordic countries is gigantic. And there are still no signs whatsoever of the changes required. The Paris Agreement, which all of the Nordic countries have signed, is based on the aspect of equity, which means that richer countries must lead the way. We belong to the countries that have the possibility to do the most. And yet our countries still basically do nothing. So until you start to act in accordance with what the science says is needed to limit the global temperature rise below 1,5 degrees or even 2 degrees celsius, I - and Fridays For Future in Sweden - choose not to accept the Nordic Councils environmental award nor the prize money of 500 000 Swedish kronor. Best wishes Greta Thunberg"

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C'est toute une hypocrisie politicienne que tacle la figure de proue du mouvement Youth for Climate : celle des gouvernements qui "ne manquent pas de belles paroles" à propos de leur prétendue écoresponsabilité, mais dont la réputation "green" s'effrite volontiers lorsqu'elle se confronte à la réalité.

"En Suède, nous vivons comme si nous avions environ 4 planètes. Et c'est à peu près la même chose pour toute la région nordique", déplore-t-elle en ce sens, évoquant entre autres choses l'empreinte écologique par habitant de son pays natal - catastrophique. Hélas, constate-t-elle encore, malgré les manifestations et les discours, "il n'y a toujours aucun signe de changement".

Et les "belles paroles" en question, c'est un peu tout ce que Greta Thunberg exècre. La jeune activiste de 16 ans veut des actes. Mais détracteurs comme dirigeants semblent avoir du mal à le comprendre, considérant volontiers son combat comme un simple "caprice" de jeune fille. Pourtant, "peu d'adolescents seraient choisis pour recevoir un prix national de l'environnement, et encore moins choisiraient courageusement de décliner le prix en fonction de leurs valeurs", constate à juste titre le site Stylist, qui perçoit même à travers le discours de la militante une réflexion acerbe sur les limites du "slacktivisme", cette pratique consistant à soutenir une cause politique ou sociale par le biais des réseaux sociaux et des pétitions en ligne.

En tirant la sonnette d'alarme, Thunberg suggère que les mots, même empreints de convictions intimes et sincères, sont finalement des protestations bien passives face à notre capacité à agir concrètement. Et une récompense ne peut pas grand-chose contre l'urgence climatique. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que Greta Thunberg s'exprime sur les gratifications qui sacrent sa lutte.

En septembre dernier, après avoir reçu le prix de la Right Livelihood Foundation (aussi appelé "le Prix Nobel alternatif"), elle expliquait posément à la Fondation : "A chaque fois que je reçois un prix, la distinction ne récompense pas ma personne propre. Je représente un mouvement mondial d'écoliers, de jeunes et d'adultes qui ont pris la décision d'agir pour la protection de notre planète". Comme un lointain clin d'oeil à tous ceux qui, avant tout obsédés par sa personnalité, en oublient la cause qu'elle défend.

 

Mots clés
Société News essentielles ecologie Monde Femmes engagées Environnement Réchauffement climatique Green
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