L’émission Comedy Class se retrouve dans la tourmente suite au bashing par Eric Judor de la comédienne Camille Fievez.
On vous en parlait il y a peu sur Terrafemina.
Face à Ramzy et l’ensemble du jury de ladite émission d'humour, confrontant "rookies" de la vanne et érudits du rire, l’actrice reconnue pour son usage réjouissant de l'absurde (chez DAVA, Babor, le Joueur du Grenier, au fil de divers sketches web), entendait à la grande surprise des spectateurs et spectatrices choqués quelques remarques du style : “Moi les trucs pipi caca prout”, ou “Ca fait rire les enfants”.
Alors même qu'Eric et Ramzy, c'est bien connu, n'ont jamais, jamais valorisé l'humour "pipi caca". Naturellement.
Et c'est de cela dont il est encore question aujourd'hui, alors qu'à l'unisson de la vidéaste Manon Bril, qui fustigeait sur TikTok le raisonnement de bien des hommes (une “hot take” critique en évidence : : quand un homme ose les blagues “vulgaires”, grivoises, scabreuses ou “pipi caca”, on l’applaudit, mais une femme, non : c’est trop “vulgaire”), la journaliste et autrice Maud Le Rest taille un costard au duo de rigolards.
L'espace d'un texte salvateur et nécessaire sur le sexisme dans l'humour...
Maud Le Rest dénonce le sexisme du duo.
Et de cette émission. Lisons la journaliste et autrice sur Instagram : "J'observe un virement très boys club dans cette émission, alors que j'ai de l'affection pour Eric et Ramzy"
Le boys club, vous savez, c'est cette expression éclose des réflexions féministes universitaires, qui désigne l'hégémonie masculine au sein des institutions et des organismes. Du monde du travail à l'école, on observe un boys club : les hommes sont majoritaires, s'organisent et se soutiennent entre eux afin de silencier les femmes.
"Il y a très peu de femmes dans Comedy Class. 3 sur 13 dans la sélection de la saison 1 et 4 sur 12 dans la seconde, suite aux sélections dans les deux cas. D'ailleurs les femmes sélectionnées semblent dans certains cas très peu expérimentées ce qui facilite leur élimination. Je ne nie pas que certaines femmes humoristes étaient décevantes, mais la vérité c'est qu'un homme moyen sera toujours moins sévèrement jugé qu'une femme moyenne dans le même cadre"
Et la journaliste d'achever ainsi son billet d'humeur fracassant : "Quand un mec dit d'une meuf qu'elle 'suce' sur scène, cela fait crever de rire le jury, lorsqu'une femme dit que sa chatte 'mouille', Ramzy lui rétorque : j'étais gêné car je pourrais être ton père... Camille Fievez qui parle de sa chatte idem, ça ne passe pas selon Eric. On peut dire bite, mais chatte, c'est non. Le sketch d'Anne Boissard sur l'IVG a été jugé "trop triste". On peut faire de l'humour noir, sauf quand l'on est une femme. Et les femmes humoristes elles doivent accepter sans broncher les blagues misogynes style 'suceuse de bite'."
Une tribune qui a fait abondamment réagir, à raison.
"Le traitement réservé au sketch d’Anne Boissard m’a ulcéré. Il était loin d’être raté et entrait parfaitement dans le thème humour noir imposé - où en introduction, Éric et Ramzy avaient explicitement dit qu’ils attendaient d’être dérangés et bousculés. Son élimination dans la foulée est incompréhensible.", "Pour ce qui est de Ramzy, sa soeur Melhia Bedia elle-même humoriste s'est plainte de réflexions denigrantes de son frère sur ses capacités à faire rire. So... je suis pas étonnée", commentent à l'unisson quelques internautes et spectateurs outrés.
"Bon ça confirme ce que je pressentais du départ de Camille Fievez. La prod l’a complètement passée sous silence (séquence de 30sec, “Camille est partie, et maintenant la grande finale, circulez”). En coulisses y a eu des trucs pas clairs c'est sûr.", "J'avais commencé la saison 1, et au passage d'une nana que j'avais trouvée drôle, j'avais bien noté que les "critiques" etaient complètement claquées. Je me suis donc arrêtée, et je confirme que mon estime pour eux a beaucoup baissé, c'était assez révélateur d'un sexisme latent. Donc ciao.", abondent les internautes.
Et l'enjeu est si important pour ce qui a trait aux luttes féministes et genrées qu'une stand uppeuse, Olivia Moore, y va de son témoignage : "Merci pour ça ! Je suis dans ce métier depuis 15 ans et d’après les commentaires - je ne peux pas regarder ce truc ça me fait mal au ventre pour mes collègues - c’est un documentaire sur la façon dont fonctionne ce métier depuis que j’ai commencé".
Détaillant encore : "Je te confirme qu’il y a des humoristes féminines à la pelle, on a même créé un fichier pour les recenser - on était plus d’une centaine et ce fichier date de plusieurs années, il faudrait y ajouter toutes celles qui ont démarré depuis. Il y a évidemment des femmes humoristes beaucoup plus senior dans le game mais curieusement on a pas été sollicitées par cette émission … Était-ce délibéré pour démontrer que décidément les femmes sont moins drôles ? Certains candidats étaient en revanche des gens qui poncent les comedy clubs depuis pratiquement 10 ans."*
D'une manière plus globale, on a à l'esprit cette citation pour le moins savoureuse de bêtise de Patrick Sébastien, en observant les commentaires très mansplaining d'Eric et Ramzy : "Il y a quelque chose qui me choque un peu là-dedans. Je ne voudrais pas qu'elles deviennent aussi vulgaires et nazes que les pires des hommes. Ces femmes qui parlent de sodomie, de règles, qui font des blagues pipi caca. Ça peut paraître idiot mais ça me dérange toujours un peu…”
Mieux vaut en rire, comme on dit.
