Damso ne craint guère les controverses.
Hier il valorisait un style où l'ode énamourée à la gent féminine brillait par sa discrétion. Aujourd'hui il incarne dans la vraie vie l'un de ses flows les plus détendus, 911 : "Call the 911, j'crois qu'un gangster est tombé love". Car le rappeur belge de retour avec un tout nouvel album, opus événementiel car il s'agit - éventuellement - de son dernier, célèbre désormais l'amour sur le plateau de CLIQUE.
Face à Mouloud Achour, l'artiste insaisissable - férue des punchlines "sales" d'un côté, en featuring avec la chanteuse ouvertement féministe Angèle de l'autre - explique la profonde révélation que représente sa nouvelle compagne à ses yeux, Milla Lapidus. Et comment elle a changé sa vie, son regard sur le monde... Et sur les femmes ?
Ca reste encore à démontrer...
Chez CLIQUE, Damso s'exprime à coeur ouvert : "Je ne crains pas de dire que ma go est exceptionnelle... Quand tu es avec quelqu'un et que tu te sens, tu es enfin en paix avec toi même. Et puis ça évite de dériver sur le téléphone le soir... Tu te dis enfin : je vais bien"
Une ode à l'amour.
De quoi laisser de nombreuses auditrices sceptiques cependant. Les spectatrices de CLIQUE ouvrent la voix sur les réseaux sociaux : "Il sera donc temps de faire des chansons qui respectent les femmes du coup non ?", "Il est en paix avec ses paroles degeulassement misogynes aussi ?", "Ses exs vont adorer écouter ça", lit-on.
Damso, un "misogyne romantique" ?
Curieuse appellation qui cependant lui colle aux basques depuis longtemps. Le vidéaste érudit Le Règlement le définit effectivement comme un "sale romantique" - "sale" étant l'une de ses signatures vocales.
Alors que d'aucuns élèvent aux nues son écriture et son flow, jadis estimé pour sa rapidité, le rappeur Belge dénote par ses références littéraires, et musicales, éclectiques. Son ton très désabusé, son goût pour l'incarnation, les sujets "bordeline", rendent complexe et trouble l'interprétation de certains de ses textes, et surtout, interrogent : à quel point "Damso" met-il de lui dans ses sons ?
L'un de ses plus controversés et populaires synthétise la chose : Vitrine, tube de Vald où il officie en featuring, et vole volontiers la vedette. D'aucuns voient en cette chanson une critique de la marchandisation des corps et des artistes, eux mêmes envisagés comme marchandise. Le clip dévoile les deux rappeurs en train de contempler derrière une vitrine les numéros de lap dance de strip teaseuses aguerries, démonstration d'un regard masculin assumé. Cependant, la critique, se voulant acerbe, s'illustre à travers une hyper sexualisation des corps féminins... Des "femmes objets".
Clip sexiste ? Féministe ? Aucun des deux ? Les questionnements se multiplient encore. Alors que le refrain, "derrière vitrine, triste vie" semble désigner le star system et ses paillettes. Ce qui n'empêche pas le son de se jouer d'un trouble très "touchy" dans sa caractérisation de la gent féminine, sa mise en scène outrancière... Et les phrasés de ses interprètes, se jouant frontalement des stéréotypes hyper sexistes voire misogynes qui collent à la culture rap.
Dans un long portrait d'il y a quelques années paru dans Les Inrockuptibles, en 2017 pour la parution de son album Lithopédion, Damso, conscient du caractère controversé de ses créations musicales, révèle lire des autrices comme Simone de Beauvoir et Virginie Despentes, s'intéresser au féminisme, aux luttes et à ses figures iconiques... Et récemment encore, l'orateur l'énonce au Figaro : "Je ne suis pas misogyne, je me suis même trouvé féministe sur certains points !".
Ce qui transparaît très discrètement dans un texte fleuri tel que son récent "Love is blind" : "Tout fait par amour, j'ai craché dans ses eyes parce que love is blind".
On est quand même loin du Deuxième Sexe.