Après les avoir aggressés, le Qatar recruterait des gays pour traquer d'autres personnes LGBT+

Publié le Mercredi 16 Novembre 2022
Maïlis Rey-Bethbeder
Par Maïlis Rey-Bethbeder Rédactrice
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Après les avoir aggressés, le Qatar recruterait des gays pour traquer d'autres personnes LGBT+
Le Qatar, pays organisateur de la Coupe du monde de football épinglé pour ces manquements aux droits humains, aurait déployé un système sordide pour punir et débusquer les personnes issues de la communauté LGBT+.
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Le Qatar, qui s'apprête à accueillir des millions de supporters venus du monde entier pour le Mondial de football, le 20 novembre prochain, n'en finit pas de créer la polémique. Les dernières informations recueillies par le quotidien britannique The Guardian révèlent une stratégie particulièrement tordue pour s'en prendre à la communauté LGBT+.

Ainsi, le journal rapporte qu'un éminent médecin qatari et militant des droits des homosexuels leur a confié que des Qataris gays n'auraient pas été torturés en échange de leur collaboration dans la traque d'autres personnes LGBT.

Nasser Mohammed vit aux Etats-Unis mais est en contact régulier avec des centaines de gays vivant au Qatar. Le médecin affirme que des réseaux secrets auraient été découverts après des arrestations préventives par le département de la sécurité.

"Un bon nombre d'entre eux [des Qataris LGBT+] ne se connaissent pas", précise-t-il. "C'est plus sûr ainsi, car quand les forces de l'ordre trouvent une personne, elles tentent alors activement de retrouver tout son réseau. [...] Il existe des agents issus de la communauté gay à qui l'on a promis de leur épargner la torture en échange de leur collaboration avec les autorités, en les aidant à trouver des groupes de personnes LGBT+", décrit Nasser Mohammed.

Au Qatar, les droits des personnes de la communauté LGBT+ sont systématiquement bafoués. L'émirat conservateur punit les relations sexuelles entre personnes du même sexe de peines de prison pouvant aller jusqu'à sept ans. Récemment, l'ONG Human Rights Watch rapportait les arrestations arbitraires, les violences physiques et sexuelles dont étaient victimes les Qatari LGBT+. Certain·e·s auraient été battu·e·s "jusqu'au sang", auraient eu la tête rasée de force et auraient été maintenu·e·s en captivité par les forces de sécurité du Qatar uniquement sur la base de leur orientation sexuelle ou de leur apparence.

Une tolérance limitée

Le gouvernement du Qatar a également été invité à commenter les affirmations de Nasser Mohammed et de Human Rights Watch. Un responsable qatari avait déclaré précédemment que les allégations de l'ONG "contiennent des informations qui sont catégoriquement et sans équivoque fausses", sans plus de précisions.

L'émirat a pourtant assuré que les supporters LGBT+ étaient les bienvenus lors de la Coupe du monde de foot. Un discours prétendument tolérant qui a ses limites : le général Abdulaziz Abdullah Al Ansari, responsable de haut rang du ministère qatari de l'Intérieur chargé de la sécurité lors de la compétition, avait annoncé en avril que les drapeaux LGBT brandis dans les stades pourraient être confisqués pour "protéger" les supporters et les supportrices.

Interrogé pour savoir s'il porterait un brassard multicolore en soutien à la communauté LGBT, le capitaine de l'Equipe de France Hugo Lloris a déclaré : "Lorsqu'on accueille des étrangers en France, on a souvent l'envie qu'ils se prêtent à nos règles et respectent notre culture. J'en ferai de même lorsque j'irai au Qatar." Une marche arrière qui n'a pas manqué de faire réagir.