Avec sa chanson "Kilsemok", Rakia s'attaque au harcèlement scolaire raciste

Publié le Lundi 05 Juillet 2021
Catherine Rochon
Par Catherine Rochon Rédactrice en chef
Rédactrice en chef de Terrafemina depuis fin 2014, Catherine Rochon scrute constructions et déconstructions d’un monde post-#MeToo et tend son dictaphone aux voix inspirantes d’une époque mouvante.
Clip de Rakia, "Kilsemok"
Dans son nouveau single "Kilsemok", la chanteuse Rakia dénonce le harcèlement scolaire lié au racisme. Une haine qu'elle a elle-même subie lorsqu'elle était enfant.
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Ce sont des mains moirées entrelacées. D'abord caressantes, elles se font oppressantes, asphyxiantes. Dans son nouveau clip Kilsemok (Qu'ils se moquent), la chanteuse Rakia aborde la question douloureuse et ô combien actuelle du harcèlement scolaire lié au racisme. Un fléau auquel elle a été confrontée, elle, la petite Nigérienne adoptée qui a grandi en Normandie. "Dans les années 2004, c'était moyennement 'à la mode' d'être noire ou femme ! J'avais beaucoup de mal-être en moi parce que j'avais du mal à m'intégrer", nous confiait la protégée d'Orelsan lors d'une interview l'an dernier.

Avec ce nouveau single, Rakia a décidé de mettre ces souffrances d'enfant en mots et en images. "Les mains représentent les moqueurs et elles étouffent les personnes qui sont moquées, raillées ou discriminées. Au début, les mains sont partout, ce qui donne une ambiance très angoissante. Comme quand on est victime de harcèlement : on est angoissé et on navigue en eaux troubles", nous explique-t-elle.

Dans son refrain, la chanteuse de 25 ans scande : "Qu'ils se moquent/ J'ai même pas peur d'eux/Qu'ils se moquent/Tant qu'ils pensent être rois/Qu'ils se moquent/Qu'on les plie en quatre". Comme un hymne guerrier, un bouclier pour se blinder contre la haine. Les attaques abjectes ("Non, je ne pue pas, je ne vis pas dans un arbre, je ne cours même pas vite"), elle les balaie, mais ne les oublie pas.

Aujourd'hui, Rakia a "fui l'arène" de l'école et du collège, ses marelles "sans ciel" et elle tente "de calmer sa haine". Ses mots en bandoulière, elle chante son mépris.

"Au fur et à mesure du clip, les personnes qui étaient submergées par les mains et l'angoisse se libèrent et font jaillir leur lumière intérieure. L'épreuve du harcèlement est derrière elles et elles sortent plus fortes de cette épreuve." Plus sereine, endurcie aussi, Rakia avance, fière. "A la fin du clip, elles sont derrière moi, ces moqueries et ces angoisses."

Ses souvenirs, sa quête d'identité, Rakia les raconte également dans sa série de podcast visuel, Le rose et le noir. Des petites pastilles dans lesquelles Anaïs, la gamine "afro-normande", raconte comment elle est redevenue Rakia. Un joli format à découvrir sur la chaîne Youtube de la chanteuse qu'on adore décidément suivre.