Les femmes joueraient aux cruches pour ne pas "effrayer" les hommes lors d'un rencard

Publié le Jeudi 19 Septembre 2019
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
6 femmes sur 10 joueraient aux cruches lors d'un rencard pour ne pas effrayer les hommes
6 femmes sur 10 joueraient aux cruches lors d'un rencard pour ne pas effrayer les hommes
Une étude britannique menée par le site de rencontre Match (Meetic, en France) a réalisé que 6 femmes sur 10 préféraient se faire plus bêtes qu'elles ne le sont lors d'un rendez-vous pour ne pas faire peur à leur potentielle conquête masculine. Angoisse.
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On a déjà entendu pas mal de faits étonnants en ce qui concerne les comportements amoureux hommes-femmes, nous voilà encore une fois surpris.es. Et pas dans le bon sens du terme. D'après une étude menée par le site de rencontres Match.com (l'équivalent britannique de notre Meetic), six femmes sur dix interrogées admettraient adopter un réflexe bien particulier lorsqu'elles se rendent à un rendez-vous galant : jouer les "cruches" - ou du moins ne pas exposer toute leur intelligence - pour ne pas faire flipper l'homme qui est en face. Une sur cinq avouerait également changer de sujet lorsque leur potentiel partenaire ne semble pas le maîtriser - plutôt que de continuer à discuter de quelque chose qui les anime. Et 82 % des personnes questionnées confient n'avoir aucun problème à sortir avec quelqu'un de "stupide" du moment qu'il était "canon" (leurs termes, pas les nôtres).

Si cette dernière phrase relève entièrement du goût de chacune, les deux premières infos révèlent un phénomène bien ancré dans la société : une femme se devrait d'apparaître légèrement inférieure à un homme pour qu'il se sente en sécurité - et finalement, le séduire. Au-delà de se complaire dans un schéma rétrograde, cela implique également qu'une femme maligne aurait moins de chance en amour que quelqu'un qui préférera mettre en valeur son compagnon au détriment de ses propres capacités. Vous avez dit masculinité toxique ?

La situation est d'ailleurs tellement commune que Psychology Today a souligné non sans réjouissance le fait que les prétendants Tinder ne seraient, eux, pas rebutés par une partenaire intelligente. Quelle générosité.

Un besoin de domination mal placé, et épuisant

Le magazine cite une étude au cours de laquelle plusieurs chercheur·ses en psychologie ont créé 24 profils sur l'application, en précisant pour plusieurs d'entre eux une licence ou un master prestigieux dans la description. Résultat, après 3600 "swipes" (et des pouces musclés, donc), ils et elles en sont arrivé·es à la conclusion que les femmes "intelligentes" (si tant est que l'intelligence se mesure aux études supérieures) ne rencontraient pas plus de difficultés que les autres à attirer l'admirateur digital. Les likes, super-likes et absence de likes pleuvaient de la même façon, en gros.

"Les résultats ont 'des conséquences importantes et positives pour les femmes sur le marché du travail, à qui on a enseigné par le passé de ne surtout pas adopter des comportements susceptibles d'améliorer leur carrière, comme l'ambition, afin de mieux s'épanouir en amour'". En d'autres termes, les femmes n'ont plus à craindre que leurs accomplissements professionnels n'intimident les hommes. Nous voilà rassurées. Sauf que pas vraiment.

Quelques lignes plus bas, le magazine tient tout de même à préciser que cette conclusion ne peut pas vraiment être généralisée en dehors de l'application. Et que si la réponse des hommes a été positive en ligne, elle pourrait changer dans la vraie vie. Traduction : avoir un parcours impressionnant fait peut-être mouche derrière l'écran, mais pas sûr que ça mène à une relation concrète tant la fragilité masculine de beaucoup pourrait être exacerbée face à une femme à cerveau. Un comportement directement lié à la façon dont on éduque les garçons : en leur faisant comprendre qu'ils doivent être le "chef" de famille, gagner plus que leur femme (hétéronormativité, quand tu nous tiens), et dominer, de manière générale. Le patriarcat, toujours. Duquel certains réussissent tout de même à s'affranchir, heureusement pour nous.

En conclusion, si vous aussi vous vous trouvez dans une situation romantique où l'autre semble troublé négativement par votre esprit, vos études ou votre répartie, fuyez. L'homme qu'il vous faut ne fantasmera certainement pas sa relation idéale d'après un modèle des années 50. Il se sera extirpé seul de ces carcans et ne vous demandera pas non plus un travail d'éveil à l'égalité hommes-femmes. Il n'aura pas peur de qui vous êtes, il sera admiratif, encourageant. Et votre savoir-faire ne le mettra jamais dans une position d'insécurité. Courage, il existe.