Les 5 bienfaits précieux de l'ennui

Publié le Mardi 24 Mars 2020
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
5 raisons qui prouvent que s'ennuyer a du bon
5 raisons qui prouvent que s'ennuyer a du bon
Parce qu'il existe de bonnes raisons de s'adonner à l'ennui, particulièrement pour notre santé mentale. En voici 5 qui nous convaincront de donner une deuxième chance à ces moments que l'on croyait sans intérêt.
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L'ennui nous connaît. On excelle d'ailleurs dans la discipline. Surtout en ce moment, à l'heure où les activités en extérieur avec d'autres personnes que celles présentes dans notre foyer sont interdites pour cause de confinement. Que l'on soit solo ou accompagné·e, l'ennui peut arriver rapidement.

L'icône du terme serait certainement la Marie-Antoinette de Sofia Coppola. Une Kirsten Dunst qui romantise le concept à l'extrême, allongée sur des sofas Louis XVI pendant qu'on la nourrit de framboises fraîches et qu'on orne ses cheveux de plumes de paon. Elle est suivie d'une cour fidèle et pourtant, elle se plaint H24 de ne savoir que faire de ses journées. Un art de vivre, finalement, que de s'ennuyer avec style.

Notre réalité est moins grandiose, on en conviendra. On peine à se trouver des points communs quand, avachie sur notre canapé usé, on se lance des pistaches desséchées dans la bouche, pas peu fière de réussir à viser juste. Il y a un gap, effectivement. Mais notre pratique de l'ennui n'en demeure pas moins salvatrice. La preuve.

1- Prendre le temps pour la déconnexion

Au 21e siècle, les réseaux sociaux incarnent justement la parade idéale contre ce qu'on considère à tort comme un fléau. Une pause dans notre emploi du temps ? On fait un tour sur Instagram, machinalement. Quelques heures à ne rien faire ce week-end ? On en profite pour regarder une série qu'on binge-watche allègrement. La technologie permet d'avoir le luxe de ne plus s'ennuyer. Sans se douter que le luxe est peut-être de s'ennuyer, en réalité. Car c'est dans ces moments où l'esprit divague, ne se concentre plus sur une image, un texte, qu'on peut enfin déconnecter et recharger ses batteries.

La Dre Caroline Leaf, neuroscientifique cognitive, explique à Glamour UK que l'ennui active un réseau pivot dans le cerveau. "C'est ce qu'on appelle le réseau du mode par défaut et il est d'une importance vitale pour le cerveau", assure-t-elle, "Lorsque vous êtes seul·e avec vos pensées - vous redémarrez votre cerveau, vous réactivez ce réseau, il remet la santé cérébrale dans le cerveau. Ce réseau ne s'éteint jamais, mais il vous oblige à passer ce temps en vous déconnectant de la technologie - à penser profondément - à vous épanouir".

2- S'apaiser l'esprit

Après la déconnexion, vient l'apaisement. En passant du temps à ne rien faire, on retrouve peu à peu le sens du mot "sérénité". L'activation non-stop de notre esprit a tendance à nous jouer des tours, on a davantage de mal à se reposer vraiment, à se retrouver seul.e avec nos pensées et à voir les choses clairement. Si l'absence d'occupation peut aussi nous faire basculer dans une remise en question permanente et nocive, voire ruminer des histoires sans importance, il existe un juste milieu entre savoir accorder du temps à l'ennui et en abuser. Et le premier cas est clairement bénéfique.

3- Stimuler sa créativité

Une étude réalisée l'année dernière par trois universités d'Australie et de Singapour appuie que l'ennui permet de devenir plus productif·ve et créatif·ve. Les sujets étaient divisés en deux groupes : une partie d'entre eux s'attaquait directement à un exercice créatif, l'autre devait d'abord s'atteler à une tâche qualifiée d'"ennuyeuse" (remplir un bol avec des perles de couleur, ce qui, avouons-le, n'a rien de transcendant). Lors de l'exercice créatif, les derniers ont surpassé les premiers : l'ennui causé par le remplissage de bol avait stimulé leur cerveau.

Un résultat qui n'étonne pas Sandi Mann, professeure en psychologie autrice de The Upside of Downtime: Why Boredom is Good. Elle indique ainsi au Time que l'ennui représente une "recherche de stimulation neurale qui n'est pas satisfaite. Si nous ne la trouvons pas, notre esprit la crée. Il n'y a pas d'autre moyen d'obtenir cette stimulation, vous devez donc chercher dans votre esprit". Et cette créativité forcée se décline sur nos hobbies, nos passions, notre vie professionnelle.

4- Influencer sa productivité

Puisque souvent l'un ne va pas sans l'autre : la stimulation de la créativité implique aussi une plus grande productivité. Plus on s'ennuie, moins on a envie de s'ennuyer, et donc d'enfin entamer certains projets qui nous tiennent à coeur. Andreas Elpidorou, professeur de philosophie à l'université de Louisville explique en ce sens à la BBC que "L'ennui est à la fois le signal d'alarme que nous ne faisons pas ce que nous voulons faire, et un 'coup de pied' qui nous motive à changer de buts". Une sorte de déclencheur utile qui nous fait voir la vie avec de nouvelles perspectives, et de nouvelles façons de se divertir.

5- S'engager

A force de passer son temps à se tourner les pouces, on se demande ce qu'on pourrait faire qui ait davantage de sens que de se perdre dans ses pensées. Recentrer notre attention sur ce qui compte, comment agir pour faire une différence. L'ennui pourrait ainsi nous inciter "à vouloir accomplir des tâches peu plaisantes, mais porteuses de sens, comme un don du sang, plutôt que des comportements plaisants, mais dénués de sens", explique Wijnand van Tilburg, coauteur d'une étude sur le sujet.

Justement, il existe de nombreuses façons d'aider, tout en respectant les mesures de confinement. En donnant son sang d'une part, mais aussi du temps, des masques ou de l'argent pour la recherche. De quoi vous occuper en faisant une bonne action.