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Victime de violences conjugales, Judith Chemla témoigne (et on l'écoute)

Publié le Jeudi 25 Janvier 2024
Clément Arbrun
Par Clément Arbrun Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
Violentée par son ex compagnon, Judith Chemla témoigne (et on l'écoute)
Judith Chemla au festival de Cabourg le 29 juin 2020
12 photos
"Silence. Désespoir. Dans six mois je partirai, mais je ne le sais pas encore. Je suis avec cet homme capable de me violenter physiquement". Violentée par son ex compagnon, la comédienne Judith Chemla témoigne dans un livre poignant.
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Dans un livre à paraître, Notre silence nous a laissées seules, dont "Le Monde" vient de dévoiler quelques extraits, la comédienne Judith Chemla (D'argent et de sang, Engrenages, Simone, le voyage du siècle) revient avec minutie sur l'éprouvante relation qu'elle a vécue auprès de l'un de ses ex compagnons.

En mots, sont relatées des violences aussi bien physiques que psychologiques. Coups, pressions, hurlements... Un récit tout simplement glaçant. Comme lorsqu'à l'entrée de l'appartement conjugal, l'ancien conjoint "se met à hurler" avant d'avoir recours à la violence physique, explique Judith Chemla : "Je ne sais plus si je me tais, si je fais face, si je continue à parler, si je hurle aussi, je me souviens juste de sa main lourde qui s'abat sur mon visage".

"La violence de son geste qui me souffle, sa bague en argent qui frappe mon arcade sourcilière...". Ce dont témoigne également l'autrice, c'est du phénomène d'emprise, et des difficultés éprouvées à partir.

"Il faut du temps pour se relever"

"Silence. Désespoir. Dans six mois je partirai, mais je ne le sais pas encore. Je suis avec cet homme capable de me violenter physiquement", peut-on lire de sa plume. C'est aussi une attitude déconcertante, volontiers "glaciale", que dépeint l'actrice, une forme de violence plus psychologique et verbale, qui l'inquiète tout autant. Parfois, "les mots pleuvent comme des coups ; le ton est mordant, offensif, volontairement blessant". Si bien que "Très vite, c'est invivable. Ses décharges de colère deviennent intolérables".

Des accès de colère qui outrepassent les éclats de voix et prennent parfois la forme d'assiettes brisées, balancées sur un mur, de violences physiques qui semblent dépourvues de limites. Très dangereusement.

Judith Chemla détaille justement les circonstances de son départ, auprès de son enfant de 11 mois. Son ex conjoint exige alors des explications. "Mes premiers mots le mettent hors de lui. Son visage se déforme ; il se jette sur moi, sans élan, comme un fauve. De toute sa puissance, il me renverse, ma chaise tombe sous son poids. J'ai basculé brutalement en arrière, ma tête est passée à quelques centimètres de la poignée métallique du meuble de rangement".

"J'ai tout son poids sur la poitrine et il me tient à la gorge. Il serre de plus en plus fort en hurlant : " Pute ! Pute ! Qu'est-ce que tu me fais ? Monstre ! Monstre ! Je te hais ! Qu'est-ce que tu me fais ? " Il m'étrangle. Il éructe : " Horreur ! Horreur ! Pute ! Monstre !". Notre fils pleure dans son parc"

Judith Chemla est parvenue à survivre, et s'en sortir. Sa voix a également pour visée de s'adresser aux personnes concernées - les victimes de violences conjugales - afin de leur apporter soutien et sororité. Une libération de la parole qui exige que l'on s'attarde sur ces pages.

Entre les lignes, la comédienne imagine que la situation serait toute autre, en terme d'actes, de prise en compte des victimes, et de lutte face à l'impunité, "si un homme mourait tous les deux à trois jours sous les coups de sa compagne, si deux cent cinquante hommes étaient violés toutes les vingt-quatre heures"...

"En écrivant aujourd'hui, j'ai l'impression de retourner dans le puits où cette agression m'a enfermée, de me tendre la main et de me tirer hors de l'obscurité. Je gis dans la cuisine où il a commis ce geste de mort envers moi avant de me laisser partir. Il faut du temps pour se relever"

Si vous ou une personne de votre entourage êtes victime de violence, vous pouvez composer le 3919, un numéro national et gratuit. La ligne est ouverte du lundi au samedi de 8 h à 22 h, l'anonymat des victimes est respecté.