J'ai testé "Aux fourneaux avec Nadiya", le show culinaire de la merveilleuse Nadiya Hussain

Publié le Mercredi 03 Mars 2021
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
"Aux fourneaux avec Nadiya", sur Netflix.
Nadiya Hussain, vainqueure du "Meilleur Pâtissier" british, a lancé son émission culinaire sur Netflix. Pour la deuxième saison, "Aux fourneaux avec Nadiya", elle ravit nos papilles et nous remonte le moral à coup de gâteaux accessibles. Qu'on a, pour l'un d'eux, tenté de reproduire.
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En 2020, Nadiya Hussain, la grande gagnante de The Great British Bake Off (sorte de Meilleur Pâtissier version britannique et sans Cyril Lignac) édition 2015 sortait la première saison de sa série culinaire sur Netflix, A table avec Nadiya. En 2021, la cheffe revient pour une deuxième session, baptisée pour l'occasion Aux fourneaux avec Nadiya. Huit épisodes de recettes animés par la virtuose de la pâtisserie, chroniqueuse pour The Times et préparatrice de gâteau pour les 90 ans de la reine Elizabeth II à ses heures perdues. Rien que ça.

Pendant environ 30 minutes, on suit ses gestes précis pendant qu'elle nous livre quelques secrets de pro destinés à nous faciliter la tâche et - surtout - à déculpabiliser nos tentatives d'imitation ratées et nos envies de "tricher" (son terme, pas le nôtre).

Entre deux commentaires adorables, drôles, piquants, elle nous montre comment réaliser trois desserts, biscuits, sucreries différentes et profite que la pâte repose ou cuise tranquillement dans le four pour nous présenter d'autres artisan·e·s talentueux. De quoi nous filer les crocs et l'envie d'enfiler le tablier qu'on avait jusque-là enfoui derrière le siphon dans le placard sous l'évier.

L'épisode 6, intitulé Régal à petit prix, cible directement celles et ceux qui ont envie de goûter au meilleur sans investir une tonne. Avec trois francs six sous, Nadiya Hussain propose donc de réaliser de visuellement délicieux biscuits, bretzels aux oignons et un fondant au chocolat qui semble crier notre nom. N'écoutant que notre courage, on a décidé de tenter l'aventure en (quasi) live, et d'écouter ses consignes à la lettre. Récit.

Facile... quand on a les bons ustensiles

Nadiya Hussain fait des prouesses.
Nadiya Hussain fait des prouesses.

Avant de décrire ce qui s'est passé ce dimanche après-midi dans ma cuisine de 3m2, précisions : à part deux pauvres spatules et un verre mesureur acheté à la va-vite chez Franprix la veille, je ne possède aucun attirail adapté à une préparation de gâteau aussi aisée soit-elle. Mon saladier sert surtout à ranger les casseroles et mon plan de travail est presque entièrement recouvert de biberons, de tétines et de pots de Blédine au chocolat (celleux qui savent, savent).

Me voilà donc en train d'essayer de faire de la place là où il n'y en a pas et de caler mon téléphone entre deux fourchettes dans le pot à couverts pour pouvoir lancer la séquence et "pâtisser" en même temps. Je n'ai même pas encore commencé que j'ai déjà de la farine sur le front. Nadiya Hussain, elle, est impeccable, souriante, sûre d'elle et a l'air de m'encourager depuis sa cuisine avec îlot central (mon rêve de trentenaire avec la véranda qui donne sur le jardin). Je finis par m'y mettre le coeur léger, guidée par sa joie communicative.

D'abord, comme indiqué par l'experte, je commence avec le plat que je beurre et recouvre d'une couche de chocolat en poudre. Je préchauffe le four à 160°C et fais ensuite fondre au bain-marie 100 g de chocolat noir et 100 g de beurre. Je mentirais si je disais que je n'ai pas passé 5 minutes à chercher "bain-marie" sur Google, pour découvrir qu'au micro-ondes, ça marche aussi. Ne me jugez pas.

Dans le fameux saladier à casseroles (vidé de son contenu pour l'occasion), je casse deux oeufs auxquels j'ajoute deux jaunes pour "une texture spéciale", dixit Nadiya. Je verse 120 g de sucre et m'apprête à fouetter le tout. Alors bien sûr, en vraie professionnelle, la mère de deux enfants utilise un fouet électrique. Parce que pourquoi s'emmerder quand on peut demander à la technologie de bosser pour nous.

Seul souci : mon fouet à moi est à la main. Un petit contre-temps qui n'est pas sans conséquences, puisqu'en plus de créer une mixture passable après 10 minutes d'effort intense, l'ustensile me provoque également un début de tendinite au poignet. La surprise (douloureuse) du chef, en quelques sortes.

Il n'y a plus qu'à ajouter 100 g de farine et passer le tout au four pendant 17 à 18 minutes, précise l'hôtesse de l'émission, pour obtenir un résultat "somptueux". "La preuve que le luxe peut-être bon marché". C'est ce qu'on va voir.

Mi-cuit, voire pas-cuit-du-tout

Aux fourneaux, Nadiya Hussain nous inspire et nous fait s'évader.
Aux fourneaux, Nadiya Hussain nous inspire et nous fait s'évader.

Au bout de 17 minutes tapantes et autant d'ouvertures du four pour vérifier que tout va bien, je sors ma concoction afin d'admirer le résultat d'un dur (bien que court) labeur. J'ai entre temps pu entamer l'épisode Mes desserts les plus décadents, à base de roulé aux fraises fraîches et d'éclairs sophistiqués, et je me réjouis d'avoir misé sur une recette à la hauteur de mes capacités (a.k.a. nulles).

Cette affirmation va d'ailleurs être rapidement démontrée, puisque mon fondant relève moins du mi-cuit que du pas-cuit-du-tout. Le test de la cuillère est formel : il n'y a pas que le coeur du gâteau qui est coulant, les bords aussi, s'effondrent dans le fond du moule, tels nos espoirs d'un printemps en terrasse dans nos esprits abattus. Reste à plonger un morceau de cet échec chocolaté dans ma bouche pour voir si j'ai vraiment tout loupé. Verdict - et heureusement pour mon ego étalé au sol : c'est un délice.

La pâte, légèrement gluante, fait l'effet d'une caresse sur un palais malmené par trop de coquillettes au beurre, mon repas de prédilection quand la flemme m'envahit de faire à bouffer (soit souvent). Ça me fait penser à la recette de ma grand-mère qu'elle tient de son père, et je souris, comblée. J'ai l'impression d'être le critique culinaire de Ratatouille, quand il mange la ratatouille de Ratatouille et se retrouve propulsé dans son enfance (là aussi, ceux qui savent, savent).

J'engloutis la moitié du plat et en laisse, fair play, à mon conjoint et à ma fille, qui vendrait de toutes façons ses parents sans hésiter pour un bout de chocolat.

On mange ensemble en lançant un troisième épisode dont je ne me souviens plus du nom. Le moment - comme le fondant - est bon.

En fin de compte, s'il fallait ne nommer qu'une raison pour laquelle binge-watcher Aux fourneaux avec Nadiya, c'est bien celle-là : au-delà de nous donner des idées pour améliorer nos desserts et repas, la cheffe Hussain crée des parenthèses enchantées, où le simple enjeu reste de réussir à maîtriser la cuisson de son soufflé, et où le monde extérieur paraît trop loin pour s'en soucier. Un sentiment plutôt bienvenu, par les temps qui courent. Alors le week-end prochain, peut-être retenterai-je l'aventure.

Aux fourneaux avec Nadiya, disponible sur Netflix.