Oui, l'ASMR version cul existe (et voilà comment le pratiquer)

Publié le Mardi 07 Juillet 2020
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
Oui, l'ASMR version cul existe (et voilà comment le pratiquer)
Oui, l'ASMR version cul existe (et voilà comment le pratiquer)
Après les caresses de pinceau à maquillage et les bruits de clavier qui aident à s'apaiser, l'ASMR aurait d'autres vertus : celles de nous exciter. Explications et mode d'emploi.
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La tendance initiale ne date pas d'hier. Ça fait déjà quelques années qu'on assiste, perplexe et intriguée (parfois même impuissante), à l'engouement d'une partie de la population digitale pour ces vidéos insolites censées nous calmer quasi instantanément. Et nous plonger dans un sommeil réparateur. Le principe est simple : des gens chuchotent très près de gros micros installés pour capter les sons les plus faibles, mâchent lentement, plongent leurs doigts dans des épices façon Amélie Poulain. Bref : des petits plaisirs fétichistes qui font du bien.

"L'ASMR est un terme utilisé pour décrire une sensation ressentie par certaines personnes en réponse à des déclencheurs visuels et auditifs", explique plus sérieusement Giulia Poerio, chercheuse en ASMR et enseignante à l'université d'Essex, auprès de Women's Health. Cela crée généralement une sensation de frissons "agréable et relaxante qui peut presque ressembler à une transe", commence au sommet de la tête et peut s'étendre jusqu'au bout des doigts et des orteils.

Dit comme ça, on penserait plus à une sieste crapuleuse qu'à un moment de repos bien mérité après le repas. Et d'ailleurs, il paraîtrait que, bien qu'il ne soit pas destiné à cet effet à la base, l'ASMR ait aussi une version cul.

L'ASMR sexuel, c'est quoi ?

On imagine déjà des scènes à base de plumeaux qu'on agite voluptueusement et de bruits de braguette qu'on défait lentement. C'est un peu ça. Le sexe sauce ASMR n'implique pas de positions spécifiques ni de nouveaux mouvements, mais plutôt de trouver un déclencheur qui vous excite. Un "trigger", dit-on en anglais. Ou un son, une sensation qui vous met dans une ambiance particulière. Une façon de se relaxer, aussi, et donc d'être plus en phase avec ce moment d'intimité.

Cela peut aller d'un doux murmure à une caresse de mains sur la peau. La vôtre, la sienne, ou la leur, selon si le mood est au plan à plusieurs. Le tout, c'est d'essayer. On ne trouve pas toujours ce qui nous titille du premier coup. "C'est un procédé d'essais et d'erreurs", prévient la sexothérapeute Caroline West. Pas pour nous décourager, mais plutôt nous inviter à cumuler les tentatives jusqu'à ce qu'un (pas si) anodin coup de langue sur le lobe de l'oreille nous émoustille. A la recherche du son perdu.

Est-ce pour tout le monde ?

Pas vraiment. De la même façon qu'une bonne partie d'entre nous reste insensible à l'ASMR classique, certain·e·s ne trouveront rien de bien excitant à quelques messes-basses et autres touchers quasi inaudibles. Pour Craig A. H. Richard, chercheur ès ASMR, il peut y avoir différentes explications derrière ce manque notoire de réactions : "La première est peut-être que ces personnes n'ont pas encore découvert leur 'trigger' idéal", imagine-t-il.

L'expert recommande de mettre des écouteurs et de lancer un tas de vidéos spécialisées, ou simplement de prendre note des sons qui nous procurent des sensations positives dans la vraie vie (le froissement d'un sachet de thé quand on l'ouvre, le bruit du linge qu'on plie). Autre exercice pratique : passer légèrement ses propres doigts sur sa peau ou sur celle de son·sa partenaire et voir ce que ça nous fait.

Il se peut également que l'on ne puisse pas du tout expérimenter l'ASMR physiquement parlant. Rien de bien grave, qu'on se rassure. Dans certains cas, les gens ne réagissent pas du tout aux déclencheurs communs, dans d'autres, ils trouvent l'ASMR ennuyeux, confie la spécialiste Giulia Poerio. C'est dit. Parfois encore, "on peut éprouver des sentiments de calme et de relaxation à partir de vidéos, mais pas les frissons", ajoute-t-elle.

Comment s'y essayer ?

On le répète, il n'y a qu'un moyen de savoir si la tendance est pour nous : la tester. Caroline West donne quelques pistes à étudier sérieusement.

D'abord, elle incite à se mettre au lit avec son partenaire et à chuchoter ses fantasmes à tour de rôle. "Lorsque vous êtes séparés, vous pouvez aussi essayer d'envoyer des enregistrements de vos murmures, de sorte qu'un sentiment d'excitation commence à se faire sentir jusqu'à ce que vous puissiez mettre ces fantasmes en pratique dans la vie réelle", encourage-t-elle.

Ensuite, l'experte conseille de se concentrer sur les préliminaires. "Le sexe oral produit des sons, ainsi que des sensations physiques, et ces sons peuvent être une source d'excitation en soi", poursuit Caroline West. Elle avise aussi de fouiller dans un tiroir (à sextoys, de préférence) en douceur, puis de sortir un accessoire après une longue et délicieuse attente. De tracer des motifs sur la peau de l'autre à l'aide d'une plume ou de ses ongles, comme pour se "frayer un chemin sur le corps de votre partenaire". Et puis, pour celles et ceux qui souhaitent se faciliter la tâche : il sera toujours temps de taper "ASMR érotique" sur YouTube.

L'important, martèlent les spécialistes, c'est de se prêter au jeu, et de s'abandonner aux sensations, auditives et tactiles, de cette nouvelle mise en bouche à nos ébats. Tout un programme, qui nous séduit aisément.