La websérie "Patience mon amour" décortique l'intimité d'un couple lesbien face à la PMA

Publié le Lundi 19 Juillet 2021
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
"Patience mon amour" © ARTE France, Bachibouzouk, Les Poissons Volants
"Patience mon amour" © ARTE France, Bachibouzouk, Les Poissons Volants
En 2016, la loi bioéthique autorisant les femmes lesbiennes à avoir recours à la procréation médicalement assistée est encore loin d'être adoptée. Seulement, c'est maintenant que Gabrielle et Alice veulent un enfant. Récit d'une lutte éprouvante et bouleversante vue de l'intérieur.
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Alice et Gabrielle s'aiment depuis 7 ans. Tellement, que quand Alice (Isabelle Joly) est diagnostiquée endométriosique, Gabrielle (Sophie de Fürst) accepte de porter leur bébé. Elle ne s'était pourtant jamais vue "avec un corps à l'intérieur de [son] corps", et elle a peur des piqûres. Une sacrée preuve d'amour.

L'amour justement, ou plutôt, la relation de ces deux femmes, c'est ce qui est au coeur de la websérie de 31 épisodes créée par Camille Duvelleroy, écrite avec Dorothée Lachaud, et diffusée en format portrait (stories obligent) sur le compte Instagram d'Arte depuis le 12 juillet. Un format qui dévoile, en trois minutes quotidiennes, les joies, les angoisses, les doutes, les engueulades, l'espoir, la tendresse, les sentiments d'échec par lesquelles elles passeront en 3 ans de tentatives de PMA.

L'intime au-delà de la procédure. L'intime au sein de la procédure.

"Changer les mentalités"

Il y a ce qu'elles imaginent d'abord, la famille rêvée, les projections sur une vie à trois, et la réalité douloureuse de ce parcours de la combattante, de cette quête interminable qui use le corps comme le coeur. Des examens en pagaille, des frais considérables, des trajets jusqu'en Espagne, des dons de sperme plus ou moins fiables, des commentaires pas toujours sensibles - voire marginalisants - de l'entourage. Des soirées à pleurer "chacune de son côté" pour faire croire à l'autre "qu'on est fortes", décrit Gabrielle un jour de craquage. Et puis, le temps qui a tendance à creuser les différends.

Pour Camille Duvelleroy, qui s'est inspirée de sa propre expérience, Patience mon amour "peut aider à passer des messages et à changer les mentalités", souligne-t-elle auprès d'Arte. Surtout, ce n'est pas qu'une affaire d'un couple. "Je veux montrer que la PMA implique d'autres personnes, comme les parents ou les ami·e·s. Elle questionne également le rôle du donneur". Son exploit : réussir à exposer et capturer un lien particulièrement fort, complexe, nuancé, entre deux personnes qui, face à l'adversité, "tiennent par l'humour". Et redonner une humanité désarmante à un protocole ultra-aseptisé.

Le 29 juin 2021, la loi bioéthique incluant la PMA pour les couples de lesbiennes a été définitivement adoptée en France. Cinq ans après leur premier essai, Alice et Gabrielle auraient certainement eu plus de facilités à concevoir le bébé qu'elles souhaitent tant. Mais aujourd'hui encore, la route reste longue pour les femmes dans leur situation. Et le regard de la société, souvent lourd de préjugés. Patience mon amour contribuera sans aucun doute à les démanteler. A ne pas louper.

Patience mon amour, créée par Camille Duvelleroy et écrite avec Dorothée Lachaud. A voir dans les stories d'@arte_asuivre tous les jours du 12 juillet au 12 août 2021.