Les premières dames au G7 : un sommet de clichés sexistes

Publié le Mardi 27 Août 2019
Clément Arbrun
Par Clément Arbrun Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
Durant ce sommet, les Premières dames se sont rendues à Espelette.
Durant ce sommet, les Premières dames se sont rendues à Espelette.
Loin de nous embarquer au firmament de "l'empowerment", le sommet du G7 a délivré son lot de clichés sexiste. Il suffit d'observer cette étonnante visite d'Espelette...
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Du 24 au 26 août s'est déroulé à Biarritz le premier sommet du G7 organisé sous la présidence d'Emmanuel Macron. Comme d'habitude, on y retrouvait les leaders des sept démocraties les plus influentes. Soit l'heure de l'introspection et de la conciliation (ou non, lorsque l'on s'appelle Jair Bolsonaro, président du Brésil) concernant les nombreux enjeux économiques et géopolitiques majeurs - comme l'évidente nécessité d'une aide financière pour l'Amazonie. Mais le changement est loin de s'inviter à toutes les tables. Car du côté des premières dames - et de leur ubuesque médiatisation - c'est plutôt un goût de rance qui s'immisce sur notre palais.

Sur les réseaux sociaux, les sarcasmes étaient d'ailleurs au rendez-vous pour commenter la place - pas vraiment prestigieuse - accordée à ces épouses durant ces deux jours. Il faut dire que ce spectacle a un petit quelque chose de comique, comme le relate avec ironie TV5 Monde. Voyez plutôt...

"Top ringard !"

Une visite un peu trop "tradi"...
Une visite un peu trop "tradi"...

Pendant que débattaient les grands de ce monde, les premières dames se retrouvaient effectivement à... visiter le charmant village d'Espelette. "A la découverte de la culture basque", précise une dépêche AFP. L'idéal pour tester de très chouettes recettes de piment d'Espelette, façon Top Chef. Un micro-événement qui prête à sourire. Ou à rire jaune.

"Les 'premières dames' se retrouvent aux fourneaux pendant que leur époux s'occupent des affaires... Top ringard !", s'amuse à ce titre un internaute, pour qui cette découverte d'un champ de piments porte peu les saveurs de l'égalité hommes/femmes. "Pendant que les chefs d'état parlent des incendies en Amazonie, leurs femmes vont cueillir des piments. Marlène Schiappa, au secours !", s'alerte une voix anonyme. Attention, sexisme.

Mais la secrétaire d'État chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes n'en démord pas et célèbre sur Twitter "l'émancipation économique des femmes". Espelette ou pas, la marche semble longue, comme lui fait remarquer une internaute sceptique : "Étrange, quand on voit les premières dames avec leur poivrons à Espelette, des images d'un autre temps, où les femmes sont reléguées au shopping".

Danses basques et chants traditionnels n'excusent pas vraiment l'aspect "vieillot" de la chose. Le plus triste étant que cet "Espelette-tour" a été concocté par Brigitte Macron herself, comme nous le rappelle le Huffington Post. Mais cette patine désuète - contrastant avec le piquant du piment - ne semble pas attrister ces hôtes que sont les "Dames" Melania Trump, Akie Abe, Cecilia Morel ou encore Jenny Morrison.

Une escale pas si rafraîchissante...
Une escale pas si rafraîchissante...

"Les hommes politiques sont tellement collés à cette vision patriarcale, qu'ils ne voient pas en quoi cette situation peut être choquante ou inadaptée aux enjeux du G7 sur la lutte contre les inégalités", s'indigne à l'inverse Isabelle Veyrat-Masson du côté de TV5 Monde. Pour la directrice de recherches au CNRS, spécialiste des représentations médiatiques, le bad buzz des champs de piments nous renvoie "au patriarcat le plus classique du 19e siècle". Tendance femmes à la maison et hommes au charbon.

"L'homme a le pouvoir et accomplit des choses sérieuses, pendant que la femme, elle, fait du tourisme", déplore l'érudite. Comme si le mouvement #MeToo et les révolutions féministes actuelles n'avaient eu aucun impact sur la sphère politicienne, son imagerie et ses coups de com'. Au contraire, Isabelle Veyrat-Masson constate "un recul". Loin des piments, les premières dames se seraient baladées du côté des "chrysanthèmes"...

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