Souffrez-vous de "FODA", la peur des rencards post-Covid ?

Publié le Jeudi 01 Avril 2021
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
Souffrez-vous de FODA ?
Souffrez-vous de FODA ?
L'heure n'est pas encore à se rouler des pelles dans un bar bondé, mais arrivera rapidement un moment où les rencontres en face-à-face deviendront chose possible. Vivement ? Pour certain·e·s d'entre nous, pas du tout. Les anglophones appelle ça la "FODA". Explications.
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Le temps est long, et nos niveaux de frustration, à bloc. Avec quatre semaines de plus à patienter sagement cloîtré·e chez soi (et un peu en extérieur) pendant que le printemps éclot, on a l'impression que le bout du tunnel promis depuis des semaines n'est qu'un doux mirage. Pire, que notre vie se résumera désormais - et pour toujours - à une très longue journée où la coupure pro-perso est aussi floue que la notion du consentement chez les boomers. Critique.

En y réfléchissant, on réalise qu'on s'est peut-être fait bien malgré nous à cette idée d'une vie socialement distancée. Où les rapports sont moins tactiles, moins fréquents, plus sélectifs. Quand on l'envisage d'ailleurs, la perspective de rencontrer quelqu'un "en vrai" (comprendre dehors, et pas par le biais d'une appli ou d'écrans interposés) nous pétrifie.

Nous qui n'étions pas forcément bien extraverti·e pré-Covid, en 2021, s'imaginer aborder une personne dont on ne connaît ni le prénom ni le résultat du test antigénique a de quoi filer des frissons. On n'a plus l'habitude et peut-être même... plus l'envie de franchir ce cap inconfortable. Pourtant, ce n'est pas celle d'être en couple qui manque.

Le phénomène a un nom : Fear of Dating Again ou la peur de "dater" à nouveau. Une expression dont l'acronyme, FODA, pensé par les cerveaux derrière l'appli Hinge, pullule en ligne et sur les réseaux sociaux. La preuve que la crainte fédère ou en tout cas, s'explique par des réflexes communs. On a voulu en savoir davantage sur ce qui effraie tant les célibataires à se lancer, et énumérer quelques solutions pour le surmonter.

Pourquoi on flippe ?

Rien de sorcier, on le devinait plus haut : ce comportement résulte d'un savoureux (non) mélange entre manque de pratique et contexte bien pourri. Et c'est Logan Ury, directrice de cet anti-Tinder, qui le dit.

"Les rencontres ont toujours été une expérience anxiogène, mais après une année de restrictions et de confinements pandémiques, il est normal de se sentir un peu plus anxieux·se qu'à l'accoutumée", analyse-t-elle auprès du magazine HelloGiggles. Pour Rachel DeAlto, experte en relations amoureuses et cheffe du service des rencontres chez Match (le Meetic américain), rien d'inquiétant non plus à éprouver ce trac d'un nouveau genre. "Il est tout à fait compréhensible d'avoir une certaine appréhension à l'égard des relations amoureuses aujourd'hui", estime-t-elle auprès de Mashable.

Elle détaille ainsi que, compte tenu de tout ce qu'on a pu vivre depuis un an - décès, bouleversement social, isolement, stress - on ne peut pas réellement s'attendre à agir comme on le faisait avant la pandémie. Non seulement, il y a ce qu'on a amassé psychologiquement en 2020, mais les rencontres 2021 ne seront pas aussi insouciantes qu'on aurait pu le penser (ou l'espérer) en décembre dernier.

Les obstacles imprévus (coucou les retards de vaccination) nous poussent à redoubler de prudence envers celles et ceux qu'on connaît peu voire pas. Et on le sait, la prudence, ça fatigue, ça angoisse, et ça donne finalement envie de s'enfermer dans sa coquille.

Alors, que faire pour décompresser quand le contexte se prêtera à des rencards moins digitalisés ?

Authenticité et lâcher prise

FODA, une crainte tout à fait légitime qu'il est possible de surmonter.
FODA, une crainte tout à fait légitime qu'il est possible de surmonter.

Déjà, s'assurer qu'on veut sincèrement tenter l'aventure couple, et pas qu'on s'y met pour se plier aux viles injonctions sociales. Ensuite, opérer par étape et dédramatiser. "Il est normal de se sentir nerveux·se et il est probable que l'autre personne ressente la même chose, alors dites-le lorsque vous êtes en rendez-vous et vous serez surpris·e de voir à quel point vous serez plus détendu·e par la suite", suggère, cette fois dans les colonnes de Metro UK, Logan Ury, qui fait campagne pour une communication claire et ouverte dès les premiers moments passés ensemble.

Elle ajoute : "Parfois, le fait de se rappeler que le rendez-vous ne concerne pas que soi peut aider à calmer les nerfs. Même si vous essayez d'impressionner votre partenaire, vous êtes aussi là pour voir si vous appréciez vraiment l'autre personne. Si vous commencez à stresser, reportez votre attention sur lui ou elle et essayez de lui trouver trois choses qui vous font craquer".

L'experte encourage aussi vivement à se défaire d'une pression nocive. "Ne vous inquiétez pas si vous n'avez pas l'étincelle avec quelqu'un lors d'un premier rendez-vous, certaines des meilleures relations sont le résultat d'une lente combustion", image-t-elle.

Même constat chez Connell Barrett, coach en séduction, qui invite à lâcher prise dès que faire se peut. "Bien sûr, ce serait génial d'établir une connexion romantique, mais abaissez un peu la barre de vos attentes pour un premier rendez-vous. Vous venez de remettre votre vie amoureuse à zéro et de commencer à revenir à la normale. Rien que ça vaut la peine d'être célébré."

Autres conseils : penser à des idées de sujets de conversation authentiques qui vous éviteront de paniquer le moment venu, sans pour autant que la discussion ait l'air complètement préparée. Oui, vous pouvez mentionner le Covid (ça va sans dire), mais essayez d'en donner quelques aspects qui ne vous plongent pas dans un blues inextricable - pour lequel on compatit toutefois grandement. Typiquement, ce que ce temps en plus vous a permis de découvrir, de mieux maîtriser.

"Une bonne façon de parler de la pandémie est de partager un projet sympa que vous avez mené pendant votre temps libre", poursuit le spécialiste. "Peut-être avez-vous appris à cuisiner, à parler espagnol ou dévoré des classiques. Vantez-vous un peu et demandez à l'autre comment il·elle a passé son temps." Une façon détournée de parler de vos passions par le biais d'une actualité forcément prenante, sans vous attarder des heures sur le Covid. Et par la même occasion, de vous aérer l'esprit.

A ce sujet d'ailleurs, tou·te·s recommandent chaudement de vous mettre d'accord sur les gestes barrières et autres examens nécessaires avant de vous retrouver. Mais là aussi, ça parait évident. Et puis, Sars-Cov-2 ou non, il y a un impératif à suivre peu importe la saison : celui de faire de sa propre personne une priorité, en attendant de tomber sur celle qui saura nous combler. Réjouissant.