Machomètre 2021 : les pires perles sexistes de l'année

Publié le Lundi 27 Décembre 2021
Clément Arbrun
Par Clément Arbrun Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
Machomètre 2021 : les pires perles sexistes de l'année
Machomètre 2021 : les pires perles sexistes de l'année
"On ne peut plus rien dire", remarques sur le physique, hommages déplacés, phrases de boomers puissance mille... Cette année, notre machomètre regorge encore une fois - et malheureusement - de tirades bien sexistes.
À lire aussi

Le happening de la comédienne Corinne Masiero aux César, le discours fédérateur de la poétesse Amanda Gorman, la victoire de Kamala Harris, la prise de parole de Simone Biles, le triomphe des réalisatrices Chloé Zhao et Audrey Diwan... Cette année 2021 a été riche en événements puissants, politiques, féministes.

Mais aussi en perles sexistes qui défrisent, décochées pour la plupart sous couvert d'un obsédant (et inquiétant) "c'était mieux avant". On espère surtout que ce sera mieux après. Voici notre Machomètre de l'année.

La "défense" de Pierre Ménès

"Ce que je pouvais me permettre il y a cinq ou dix ans, je peux plus le faire. Je suis conscient que tout ce qui m'est reproché est intolérable dans le logiciel de 2021". Ainsi se défendait Pierre Ménès sur le plateau de Touche pas à mon poste en mars 2021. La raison de son discours ? Des accusations d'agressions sexuelles relatées dans le documentaire Je ne suis pas une salope, je suis une journaliste de la journaliste sportive Marie Portolano.

La "défense" de Pierre Ménès
La "défense" de Pierre Ménès

Pierre Ménès en profitait alors pour fustiger entre les lignes la révolution #MeToo. "On peut plus rien faire, on peut plus rien dire", affirmait-il. Face à Marie Portolano, Pierre Ménès déclarait déjà : "Si on ne peut plus rien dire à une femme parce qu'elle est une femme, ça, c'est sexiste. Dire à une fille qu'elle est jolie avec son décolleté, moi je trouve ça plutôt gentil".

Guillaume Bigot et son "Greta Thunberg ménopausée"

"Si vous l'écoutez, on a l'impression d'une illuminée. C'est de la folie verte. C'est une sorte de Greta Thunberg ménopausée", a déclaré le 26 septembre 2021 l'éditorialiste Guillaume Bigot sur la chaîne d'informations Cnews, à propos de la femme politique Sandrine Rousseau. En tant que candidate à la primaire écologiste et écoféministe revendiquée, celle-ci a fait l'objet de nombreuses attaques sexistes.

Tout comme la jeune militante Greta Thunberg d'ailleurs, aussi bien diabolisée par Donald Trump que par Michel Onfray. "Greta Thunberg débite des trucs ultra violents. C'est un peu ce que fait madame Rousseau", avait encore poursuivi l'éditorialiste sur ses réseaux sociaux.

Fabien Lecoeuvre à Hoshi : "Elle est effrayante"

Au mois d'avril, le chroniqueur Fabien Lecoeuvre commentait sans détour le physique de la chanteuse Hoshi sur les ondes de la webradio Arts-Mada : "Vous mettez un poster de Hoshi dans votre chambre, vous ? Elle est effrayante. J'ai rien contre cette fille qui est géniale (...) mais qu'elle donne ses chansons à des filles sublimes".

Une "analyse" qui se passe de commentaires.

Et qui a suscité une grande vague de soutiens, médiatiques, artistiques, féministes. Dans les semaines qui ont suivi, la commune de Mouans-Sartoux (Alpes-Maritimes) déployait en pleine avenue centrale une affiche triomphale de Hoshi, une question en évidence : "Ça va Fabien, pas trop effrayé ?". Le slameur Grand Corps Malade a dédié quant à lui une chanson à cette sortie déplorable : Des gens beaux.

"Je suis pas persuadé qu'Édith Piaf possédait de belles jambes élancées / Qu'elle allait défiler sur des beaux podiums avec des grandes marques de talons compensés", y raconte notamment l'artiste. A bon entendeur.

Eric Zemmour, pour l'ensemble de son oeuvre

"En réalité, le seul clivage spécifique activé par la candidature Zemmour, dont la structure est plus homogène que celle d'un électorat lepéniste, est le genre : nombre de femmes ayant sans doute du mal à voter pour un homme qui assène de telles positions", affirmait en octobre dernier une étude Ifop pour Le DDV (Le Droit de Vivre) - Licra axée sur les intentions de vote associées au candidat Eric Zemmour. Une "sociologie du Zemmourisme".

Eric Zemmour, bien placé sur le Machomètre
Eric Zemmour, bien placé sur le Machomètre

Derrière les sous-entendus de cette étude, une réalité : les propos misogynes décochés sur les plateaux et sur le papier par l'auteur du Premier Sexe depuis des années. Accusé de harcèlement et de violences sexuelles, le candidat affirmait encore en septembre à Léa Salamé : "A partir du moment où il y a des secteurs où les femmes sont en majorité, il y a quelque chose qui se passe, le métier est déconsidéré. Il y a un rapport compliqué".

No comment.

"Ses seins ont fait rêver" : "l'hommage" de Bernard Pivot

Bernard Pivot ne déçoit jamais. Au sujet de la militante écologiste Greta Thunberg, il déclarait en 2019 : "Dans ma génération, les garçons recherchaient les petites Suédoises qui avaient la réputation d'être moins coincées que les petites Françaises. J'imagine notre étonnement, notre trouille, si nous avions approché une Greta Thunberg...".

"Ses seins ont fait rêver" : "l'hommage" de Bernard Pivot
"Ses seins ont fait rêver" : "l'hommage" de Bernard Pivot

Le taux de boomer-itude sexiste perdure à un bon niveau deux ans plus tard. En juillet dernier, l'actrice et militante féministe Françoise Arnoul nous quittait à l'âge de 90 ans des suites d'une longue maladie. Bernard Pivot tweetait alors : "Ses seins ont fait rêver les jeunes gens des années 50. Mais ceux qu'on pouvait admirer dans le film 'L'épave' n'étaient pas les siens. Elle m'en a fait l'aveu au cours d'une émission. Encore mineure, elle n'avait pas eu le droit de tourner dénudée".

On ne peut rêver hommage plus distingué.

Jean Castex qui qualifie Léa Salamé de "stagiaire"

C'est sur le plateau de l'émission On est en direct du samedi 4 septembre, présentée par Laurent Ruquier et Léa Salamé sur la seconde chaîne, que le Premier ministre Jean Castex s'est vautré dans le sexisme l'espace d'une "blague" d'une confondante légèreté.

Au détour d'une question, le ministre s'est tourné vers Laurent Ruquier, évoquant Léa Salamé sans pour autant s'adresser à elle (évidemment) : "C'est une bonne stagiaire, vous me la prêterez comme stagiaire tout à l'heure", a-t-il assuré, quêtant une complicité que jamais il ne trouvât.

Subtil.

"Je te parle comme je veux, ma cocotte" : les propos de l'ex-maire de Paimpol

C'était en avril dernier. En plein conseil municipal, l'ancien maire de Paimpol (Côtes-d'Armor) s'adressait à la maire socialiste Fanny Chappé. En des termes pour le moins douteux : "Je te parle comme je veux, ma cocotte", décochait ainsi Jean-Yves de Chaisemartin à son opposante politique. Une assertion sexiste rapidement fustigée sur les réseaux sociaux.

"On en est encore là en 2021. Être femme maire, c'est aussi vivre cela. Je n'ai pas reçu d'excuses. Je désire lutter contre la banalisation des propos sexistes: un combat que je mènerai en tant que qu'élue, citoyenne, maman", fustigeait en retour Fanny Chappé. Une mobilisation quotidienne.

La chanson ultra boomer deux mille "TikTok Girl"

"Et elle pense / Oui elle pense / Que la fame et les likes vont atténuer ses peurs / She's a TikTok Girl" / "Dans les couloirs du lycée / Elle s'imagine Kylie Jenner / C'est la vie dont elle rêvait / Millions de likes et commentaires"... Ceci n'est pas un tweet de Bernard Pivot ou un communiqué de Jean-Michel Blanquer, mais une chanson du duo de vidéastes McFly et Carlito : TikTok Girl.

Autrement dit, une observation à moitié ironique des créatrices qui proposent du contenu sur TikTok, et notamment des jeunes filles. Une chanson qui n'a pas vraiment suscité l'adhésion. Les comédiens y chanteurs y détaillent encore : "Elle veut être la première / Et ça fait... Legging, crop-top, paire de Crocs / Mains sur les hanches et fesses en arrière". Une chanson issue de l'album du duo, sobrement intitulé Notre meilleur album.

Trait d'humour qui passe mieux que ce discours de daron pas très fin.

Noël Le Graët : "Elles peuvent se tirer les cheveux, ça m'est égal"

"Elles n'ont aucun match perdu. Donc elles peuvent se tirer les cheveux, ça m'est égal". Ainsi s'exprimait Noël Le Graët, le président de la Fédération française de football (ou FFF), à propos de l'équipe de France féminine. C'était en mars 2021. Des propos qui ont suscité l'indignation.

Celle de la ministre chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, Elisabeth Moreno, notamment. Celle-ci a rétorqué sur Twitter : "Sexisme ordinaire en action. Ces propos véhiculent des stéréotypes d'un autre temps". Avant de conclure : "L'égalité entre les femmes et les hommes reste à accomplir dans les faits comme dans les esprits". Un but idéal pour 2022.

Le sexisme de "Koh Lanta" nouvelle cuvée

"Dans 'Koh Lanta', les femmes sont souvent présentées comme stupides et on observe l'association des champs lexicaux de la faiblesse et du féminin". Voilà ce qu'affirme le rapport du Haut conseil à l'Egalité sur la téléréalité française à propos de l'une des émissions les plus populaires de la première chaîne. Une émission très efficace qui existe depuis deux décennies, mais ne se résume malheureusement pas à d'intelligentes tactiques.

Dénigrement entre candidates, moqueries sexistes, épreuves genrées, élimination stratégique des candidates féminines... La saison 2021 de Koh Lanta - sa vingt-deuxième - n'a pas dénoté par son féminisme décomplexé, c'est même tout l'inverse. Du déroulé des émissions à leur accueil parfois virulent sur les réseaux sociaux, où certaines candidates ont été victimes de cyber harcèlement. Triste état des lieux.